Médecins tous les deux, le ministre de la santé Olivier Véran comme sa prédécesseure Agnès Buzyn, sont des fans de la première heure des IPA, à rebours pourtant d'une grande partie du corps médical. En effet, quand le cadre de la pratique avancée a été posé par décrets en 2018, les médecins libéraux d'abord, ont commencé à craindre une « déstructuration des parcours de soins et une inflation des coûts et des actes sans amélioration de la qualité des soins », le tout dans un contournement « organisé » du médecin traitant, comme le résumait la CSMF.
Un peu plus de deux ans après l'arrivée sur le terrain des premières IPA, les syndicats restent sur le qui-vive alors que les pouvoirs publics semblent vouloir aller encore plus loin, qu'il s'agisse de primoprescription, de la création d'IPA « praticiennes » en ville qui pourraient intervenir en premier recours sur des pathologies bénignes ou de l'entrée en pratique avancée des infirmiers anesthésistes (Iade). En ville, hors de question que la pénurie médicale serve de prétexte pour déréguler le système de santé. Les infirmières en pratique avancée (IPA) doivent être « sous la responsabilité des médecins, mais ayant une autonomie après orientation par le médecin dans le cadre d’un parcours de soins coordonné et protocolisé », rappelle le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF. En revanche, l'accès direct à l'IPA, c'est non. « Cela créerait de la défiance et serait totalement en contradiction avec le parcours des soins », prévient le Dr Jacques Battistoni, président de MG France.
En effet, si on suivait ce schéma, le super-infirmier prendrait « les actes simples » pour ne laisser aux médecins que les actes complexes… à 25 euros. « On donne une partie de notre activité à une autre profession avec des tarifs encore moins chers. On ne peut pas continuer comme cela », tempête le Dr Jérôme Marty, président de l'UMFL. Du côté des spécialistes libéraux, Avenir-Spé est d'accord pour accompagner la montée en puissance des IPA en incitant notamment les pouvoirs publics à revoir leur modèle économique. Mais la limite est claire. « Il ne saurait être question d'autonomie totale, recadre le Dr Patrick Gasser, son président. Les IPA doivent travailler dans le cadre collaboratif au sein d'une entreprise libérale, avec un lien de subordination. »
Égalité salariale
À l'hôpital, la vigilance est encore plus forte. Le président de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF) est toujours vent debout contre l’introduction des IPA dans les urgences. « Ces personnes vont avoir le diagnostic, les orientations et les prescriptions mais sont moins payées que les médecins, prédit le Dr Patrick Pelloux. Ensuite leur revendication sera l'égalité salariale ». Les représentants des médecins anesthésistes, eux sont même totalement opposés à l'entrée en pratique avancée des infirmières anesthésistes. « L’anesthésie ne se réduit pas à un acte, c’est un parcours qui est entièrement médicalisé, avertit la Dr Emmanuelle Durand, présidente du SNPHAR-e. Si on démédicalise le parcours, il y aura une baisse de la qualité et de la sécurité des soins ». Le syndicat a même déposé un préavis de grève pour le 2 février prochain pour cette même raison.
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