Courrier des lecteurs

Un métier merveilleux… toujours plus formaté par la Cpam

Publié le 07/01/2023

Crédit photo : GARO/PHANIE

Il semblerait que le mouvement de grève des généralistes en décembre ait été noyé, dans les médias, sous d’autres sujets bien plus « importants » que la revendication d’une consultation à 50 euros – revendication occultant ce qui pose en réalité problème. Pourtant, les médecins libéraux en première ligne de la mobilisation avaient de quoi sensibiliser l’opinion publique : main mise de la Cpam sur l’exercice libéral avec de plus en plus de critères arbitraires dans ce qui était initialement une bonne idée, la Rosp.

La carotte commence à avoir un goût bizarre. Pour une poignée d’euros, ils invitent les médecins à se regrouper en MSP, ESP, CPTS. À défaut, le médecin libéral indépendant n’aura pas son forfait structure. Une discrimination flagrante passée avec le reste du plat. Pas de critères valides pour la téléconsultation sauf si on paye la dîme d’une plateforme de type Doctolib. Collusion effroyable d’une administration avec des start-up aux dents longues et aux méthodes commerciales envahissantes.

Que vous soyez avec une consultation sans rendez-vous ne vous permet pas de remplir le SAS : la médecine à l’ancienne n’a plus sa place. Ce bon médecin que vous pouvez consulter dans la journée pour l’otite de votre enfant plutôt que d’entendre qu’on ne peut vous recevoir que la semaine prochaine… Sans doute ces médecins regroupés ont rempli le critère de deux heures au minimum de consultations hors rendez-vous. Le fait que la consultation des soins non programmés tombe dans l’escarcelle des structures SOS Médecins, qui ont compris que la rentabilité ne passe plus seulement par des visites d’urgences ressenties, ne fait pas non plus battre les cils des diplômés de santé publique. Il leur suffit de créer le médecin généraliste exemplaire, qui remplira tous les critères d’une prise en charge idéale du patient dans sa dimension médico-psycho-sociale, avec une quatrième année d’internat pour terminer le formatage des futurs MG.

Un acteur comme un autre dans la grande chaîne du soin, voilà l’avenir du MG : libéré des tâches administratives, dans un système où tout passe par des recommandations et des arbres de décision basés sur des principes décidés par le PLFSS. Avec le risque que ce merveilleux métier se transforme en routine quotidienne, ce qui épargnera au moins du burn-out…

Que vous ayez construit un réseau (infirmier, kiné, orthophoniste, sage-femme, aide-soignant, médecin) où chacun des acteurs se connaît, communique, partage, n’a finalement de valeur que si vous avez fabriqué une CPTS subventionnée dont un des critères de validité sera la réunionite chronique.

Tout part sans doute d’un bon sentiment : améliorer l’accès au juste soin. Pour autant, supprimer la part d’aventure que comporte la médecine est digne d’un assassinat des vocations. Quand, sur BFMTV, on entend un chroniqueur vanter les mérites de l’IA en Corée du Sud pour remplacer les médecins ou que, dans les Yvelines, ils commandent 50 cabines de téléconsultation, on se dit que la carrière des hommes en blanc est bien finie…

Dr R., Alpes-Maritimes


Source : lequotidiendumedecin.fr