Courrier des lecteurs

Violences conjugales, jusqu’à quand ?

Publié le 03/12/2022

Crédit photo : GARO/ PHANIE

« #NeRienLaisserPasser. Tous mobilisés contre les violences faites aux femmes. » Le vendredi 25 novembre 2022, le gouvernement s’engage et une page complète est consacrée au sujet dans les Dernières Nouvelles d’Alsace. J’entends aux infos de 13 heures notre Président se féliciter du chemin parcouru et son optimisme sur ce qu’il reste à faire : « améliorer la formation des professionnels en première ligne ». Parlons-en !

L’appel d’une femme gendarme m’obsède :

« Votre patiente est une femme dangereuse. Elle s’est présentée à la gendarmerie avec votre certificat d’ITT et un couteau de cuisine imposant. Elle va être poursuivie pour cela.

– Elle se sent en danger. Samuel Paty avait, lui, un marteau dans sa poche ! »

Ma patiente de 30 ans vient d’emménager ici pour fuir son compagnon. Elle avait, pour lui, quitté sa région natale et sa propre famille qui l’a rejetée pour avoir intenté un procès à son beau-père maltraitant. Déscolarisée à 16 ans, elle a décroché son permis de conduire puis différents jobs qu’elle a dû abandonner en raison de douleurs diffuses et quotidiennes malgré les traitements. Mal dans sa peau, elle a tout arrêté et suivi un amoureux. Le couple, sans revenu stable, s’installe chez les parents du jeune homme. Sa nouvelle famille ne la comprend pas et souhaite qu’elle travaille « comme tout le monde ». Conflits et réconciliations s’ensuivent. Elle appelle le 15 à plusieurs reprises devant l’intensité des douleurs après chaque dispute. Puis elle trouve la force de déménager. Alors qu’elle tente de récupérer ses affaires, une violente dispute éclate avec des coups plus violents. La mère de son compagnon tente la modération…

Quand elle veut vendre son ordinateur neuf, qu’elle a laissé à son compagnon, elle subit de nouvelles menaces, du père cette fois. Elle est paniquée, se sent menacée, récupère un couteau et mon certificat pour se rendre à la gendarmerie et déposer plainte.

- « Ils m’ont maltraitée, m’ont dit que trois jours d’ITT, c’était pas grand-chose, que je serai poursuivie pour port d’arme. Je suis seule au monde, je veux me suicider. Les traumatismes psychologiques, ça ne compte pas ? »

Je lui remets un nouveau certificat avec 14 jours d’ITT pour exacerbation de son traumatisme psychique par les maltraitances de son ex-compagnon et de ses parents puis des gendarmes.

Combien de temps faudra-t-il pour que les professionnels en première ligne cessent d’être, eux aussi, une menace pour les femmes et les enfants victimes de violences ?

Dr Monique Weber, Rouffach (Haut-Rhin)


Source : lequotidiendumedecin.fr