Face à la multiplication « des dérives de l’utilisation » des avis Google, l'UFML Syndicat a décidé de prendre les devants.
Après la publication d'un guide pratique par l'Ordre des médecins il y a quelques mois, visant à aider les médecins à gérer au mieux leur réputation numérique, le syndicat lance ce lundi « une action de prévention » pour accompagner les médecins libéraux souvent démunis face à des commentaires négatifs (accompagnés d'une mauvaise notation), laissés par des patients après une consultation médicale.
Plus violent qu'une sanction
« J'ai régulièrement des remontées de dizaines de médecins qui sont dépourvus face aux commentaires négatifs laissés sur eux, assure au « Quotidien » le Dr Jérôme Marty, président de l'UFML-Syndicat. Ils ne savent pas comment réagir, surtout en cas de commentaires anonymes et ne veulent pas rompre le secret médical. Or ces remarques sont publiques, visibles par tous les autres patients qui n'ont pas le contexte de la consultation. C'est parfois plus violent qu'une sanction disciplinaire pour un médecin ! »
Concrètement, le syndicat propose aux médecins d'ajouter le message suivant, en forme d'avertissement aux patients, sur leur profil « Google My Business » : « Il vous est possible de poster des commentaires sur mon activité et le vécu de votre consultation. Face aux dérives constatées dans l’exercice de ce service, il est à préciser que tout commentaire diffamatoire à mon égard, à celui de ma profession, ou portant atteinte à mon honneur ou à ma probité entraînera le dépôt d’une plainte auprès de la juridiction compétente et la saisie immédiate de l’avocat de mon syndicat professionnel et de Google ».
Messages dégradants
Selon le Dr Marty, certains patients expriment des messages « diffamants, dégradants », remettant en cause les compétences professionnelles du praticien. « Parfois, certains sont même dans une attitude de harcèlement, et laissent des messages péjoratifs semaine après semaine », précise le généraliste de Fronton.
Il suffit de rechercher un médecin sur le célèbre moteur de recherche pour s'apercevoir que les avis sont très disparates pour un seul et même praticien. Ainsi ce gynécologue-obstétricien parisien est-il qualifié de « nul » par une patiente, qui qualifie ses appareils de « datés ». « Des médecins ayant vu les échographies faites par ce médecin ont dit que les images n'étaient pas lisibles. Si votre bébé a un problème, vous risquez de vous en apercevoir que trop tard », écrit-elle... tandis qu'une autre patiente le qualifie de « génial, gentil, aimable et qui explique bien ».
Le syndicat a également prévu de saisir Google, afin que la société interdise « toute publication d’avis sous anonymat ». « Les avis délivrés par les patients doivent être une richesse pour renforcer la qualité des soins, mais ils doivent se faire à visage découvert pour permettre la réponse des praticiens, affirme le Dr Jérôme Marty. Les règles du secteur marchand ne peuvent pas s'appliquer aux professions médicales, nous ne vendons pas du soin ! ».
Réactivité
Au-delà du cas de Google, la problématique des avis ou propos hostiles d'internautes n'est pas nouvelle. En octobre 2018, l'Ordre avait rappelé que les personnes visées par certains commentaires négatifs ou inappropriés « disposent de différents moyens d’actions juridiques afin de limiter l’atteinte subie et d’obtenir réparation de leur préjudice ». L'institution donnait plusieurs conseils dont la réactivité « primordiale » dans le monde du numérique, tout comme la preuve de la publication (capture d'écran).
Dans le cas d'avis négatifs mais pas illicites (comme un temps d'attente excessif), l'Ordre conseillait de répondre en adoptant « une attitude ouverte et en fournissant une réponse empathique ». Le recours au droit de réponse est une autre option. L'Ordre proposait aussi une méthode type pour répondre à des commentaires négatifs (en cas de désagrément lié aux soins, de consultation jugée trop courte, etc.).
Mais certains avis dépassent le cadre de la liberté d'expression. Seul un avocat pourra aider le médecin à en déterminer la nature, insistait l'Ordre. Il peut même s'agir d'un délit pénal ou de faits ouvrant droit à une action au civil. Des « injures » ont été reconnues par les tribunaux telles que « buse », « larbin » mais aussi des propos xénophobes, racistes ou sexistes. L'Ordre citait également « voleur » ou « nazi ».
Le guide ordinal n'oubliait pas la diffamation (description d'une salle d'attente comme étant insalubre, attribution d'erreurs médicales, etc.), les incitations à la haine ou à la violence ou encore le dénigrement (un praticien qui se fait traiter de moins compétent qu'un autre) et les atteintes à la vie privée (publication de photos, vidéos).
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents
Affaire Le Scouarnec : l'Ordre des médecins accusé une fois de plus de corporatisme
Procès Le Scouarnec : la Ciivise appelle à mettre fin aux « silences » qui permettent les crimes