L’étau se resserre de tous côtés. Après la Cour des comptes lundi, qui a proposé un plan d’économies de 20 milliards d’euros sur la santé à l’horizon 2019, le comité d’alerte indépendant sur les dépenses d’assurance-maladie a publié ce mardi 15 avril un avis tirant à sa façon la sonnette d’alarme. Au menu : un appel à une « vigilance renforcée » sur l’évolution des dépenses de soins de ville 2025, ainsi qu’une « action déterminée visant à réduire le point de fuite majeur de l’Ondam que constitue le déficit croissant des établissements publics de santé ».
Cette tendance des premiers mois 2025 est d’autant plus préoccupante que le comité d’alerte a déjà constaté un « important dépassement » de l’Ondam précédent fixé par la loi Sécu 2024. Ainsi, les dépenses de soins de ville (un poste à 109,9 milliards) ont progressé l’an dernier de 4,1 % contre 3,2 % prévus par la loi de financement, ce qui signifie un dérapage de 1,5 milliard d’euros. Par ordre décroissant d’importance en montant, le dépassement de la prévision initiale est imputable aux médicaments, aux indemnités journalières, aux honoraires de médecins spécialistes, aux honoraires des kinés, aux actes de biologie médicale en laboratoire, aux dispositifs médicaux et aux dépenses hors prestations. Quant à la progression des dépenses relatives aux établissements de santé, elle a été également « plus forte qu’anticipé ». En montant, le principal dépassement 2024 concerne les activités tarifées de médecine-chirurgie-obstétrique (soit 100 millions).
Une partie des économies acquises mais…
Pour 2025 cette fois, la situation n’est guère plus reluisante. La LFSS a fixé l’Ondam à 265,9 milliards d’euros, en progression de 3,4 %. Mais là encore, le comité indépendant constate des « risques importants de dépassement » de l’objectif 2025, « à défaut d’un encadrement effectif des dépenses de soins de ville ».
Certes, une bonne partie des économies prévues (soit 3,2 milliards sur 4,3 milliards d’euros) sont acquises. Elles correspondent à des baisses de prix des médicaments, à la prise en compte dans les tarifs 2025 des gains de productivité attendus des établissements de santé, à l’abaissement du plafond du revenu d’activité pris en compte pour calculer les indemnités journalières, à la baisse des tarifs des actes de biologie médicale ou encore à l’effet du doublement du montant des franchises et des participations forfaitaires (au printemps 2024).
Mais pour le comité d’alerte, l’Ondam 2025 reste « affecté » par plusieurs « incertitudes et faiblesses de construction », à l’instar du milliard d’économies attendu sur les prescriptions de médicaments « non encore acquises ». C’est le cas également des 900 millions d’euros d’économies programmés au titre de la maîtrise médicalisée et de la lutte contre les fraudes. Pour ces postes, « la réalisation des économies n’est que partiellement documentée », relève le comité d’alerte. Ainsi, « leur réalité n’est que partiellement avérée », peut-on lire. Et une fois encore, la Cour regrette que les mises en réserve de financements ne concernent pas les soins de ville (contrairement aux crédits destinés aux établissements au titre du coefficient prudentiel).
Dernier motif d’inquiétude : le déficit croissant des hôpitaux depuis 2021 (66 % d’entre eux se trouvant en déficit en 2024 au niveau de leur budget principal). Et les remontées comptables les plus récentes « indiquent dès à présent une poursuite de la dégradation de leur situation financière ».
Comme chaque année, le comité d’alerte procédera à un nouvel examen des dépenses couvertes par l’Ondam dans son deuxième avis qui sera publié en juin. C’est dans ce cadre que cette instance pourrait réclamer au Parlement et au gouvernement des mesures de redressement en cas de risque de dérapage confirmé.
Sauver notre modèle social
Coïncidence ou pas ? L’avis du comité d’alerte sur les dépenses maladie est intervenu dans un contexte très particulier, François Bayrou ayant lui-même présidé ce mardi un « comité d’alerte sur le budget », décrivant un constat très préoccupant sur la situation des finances publiques. Le gouvernement entend réaliser pas moins de 40 milliards d’économies en 2026, un effort qui n’épargnera pas la santé.
Si l’exécutif n’a pas dévoilé ses intentions, la ministre Amélie de Montchalin (Comptes publics) a évoqué « la grande dérive » des dépenses liées aux arrêts maladie, sur laquelle « il faudra agir » en leur caractère de « dépense injustifiée ». De son côté, Catherine Vautrin (Santé, Travail, Solidarités, Famille) a appelé à ce que tous les acteurs du secteur de la protection sociale travaillent ensemble dans les prochaines semaines « pour dessiner des solutions pour sauver notre modèle ». Le Premier ministre a annoncé que les grandes orientations du budget 2026 seraient proposées « avant le 14 juillet ».
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