Une petite tête blonde apparaît à la porte de la salle où le musicien Jean-Marie Gerintes dispose ses instruments sur le grand tapis rouge.
À peine sa maman finit-elle d'expliquer l'impatience de sa fille que Lola, 3 ans, est devant les xylophones de bois aussi grands qu'elle. Le musicien plaque un accord sur sa guitare. Elle répond par deux coups de xylo. Guitare. Xylo. Une « souris verte » se devine, et la petite voix enfantine se fond dans celle du musicien dont le visage se fend de larges mimiques qui font rigoler les enfants.
Pendant une heure, Lola, un temps rejoint par un petit garçon, chante, secoue les maracas, s'empare d'une boîte à oiseaux ou mime le pas du poney avec une noix de coco. Les soignants saluent le petit groupe en passant devant la salle. « Elle est plus en forme que la semaine dernière où nous étions allés dans sa chambre », note Jean-Marie Gerintes. Lola se défoule, rêve, et oublie pansements, tuyaux et soins. Qui ne lui en tiennent pas rigueur. « Elle était trop contente » glissera l'infirmière qui attendait la petite, au musicien.
Jean-Marie Gerintes anime l'atelier musique tous les vendredis depuis 5 ans - grâce aux financements de l'Étoile de Marin et du Comité du Cœur de la Sacem ; voilà plus de dix ans que l'association dont il dépend, « Musique et santé », est présente à l'Institut Gustave Roussy. Les soignants sont convaincus de l'intérêt de la musique dans une prise en charge holistique. « Cela permet de rompre l'enfermement dans lequel la maladie peut plonger les enfants et leur famille ; cela leur permet de garder confiance dans ce qu'ils sont, des personnes à part entière, de gagner en qualité de vie, et de s'exprimer ; cela les aide à passer à travers la maladie et à ne pas perdre pied dans l'après-cancer », explique la Dr Dominique Valteau-Couannet, chef de service.
De l'ordinaire et de l'évasion
« L'atelier du vendredi est une manière d'apporter des repères aux enfants et de réintroduire de l'ordinaire dans l'épreuve », observe l'éducatrice Édith Cuguen, qui chante avec les enfants sur Pirouette cacahuètes ou la comptine de la pluie. Un pouvoir apaisant auquel les soignants recourent lors des soins douloureux, en chantant ou en diffusant le CD « Les petites oreilles » que Musique et Santé a réalisé il y a quelques années avec les enfants de Gustave Roussy.
La musique est aussi évasion. Après l'atelier collectif, Jean-Marie Gerintes se rend dans les chambres des enfants qui n'ont pu quitter leur lit ou sont en soins aigus. Nolann, 9 ans, décroche son regard de la télé et chante avec le musicien. Son visage s'éclaire, sa voix s'affirme, puis il écoute bouche bée le son du sanza, autrement appelé kalimba ou piano à pouce (des lames de différentes tailles montées sur du bois). Il s'empare de l'instrument africain. « Tu pourrais faire de la musique, tu as une très bonne écoute », l'encourage Jean-Marie. L'enfant sourit à l'avenir. Sa mère s'émeut. Parfois la musique vient libérer les pleurs et les peurs.
Une fois par mois, Musique et santé fait venir des musiciens de l'Orchestre national de France (de Radio France) à l'IGR, qui interprètent le répertoire classique. « C'est exceptionnel de voir des tout-petits battre la mesure sur du Mozart. Cela leur ouvre l'esprit et leur fait découvrir d'autres sensations », s'émerveille la Dr Valteau-Couannet. Les ados et les médecins viennent profiter du concert. Il n'est pas rare que les enfants, après leur passage à Gustave Roussy, se mettent à la musique.
Article précédent
La musique, un puissant stimulant cérébral
La musique, un puissant stimulant cérébral
À Gustave Roussy, la musique entrée dans les m(c)oeurs
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024