Les complications cardiovasculaires liées au traitement du cancer (chimiothérapie, radiothérapie) sont une des principales causes de morbidité et de mortalité chez ces patients. Actuellement, le traitement du cancer connaît de grandes améliorations sur le plan du diagnostic et de l'efficacité des thérapies novatrices, conduisant à une augmentation significative de la survie et de la qualité de vie.
La compréhension des mécanismes moléculaires associés à la croissance tumorale a permis l'émergence de nombreuses stratégies thérapeutiques efficaces, en plus de l'arsenal conventionnel. Parmi les médicaments cytotoxiques, les anthracyclines constituent l'une des classes les plus importantes. Antibiotiques s'intercalant dans l'ADN, elles peuvent générer un fort stress oxydatif et inhiber la topo-isomérase II alpha 3, entraînant la mort des cellules tumorales.
La doxorubicine, une des molécules chef de file de la famille des anthracyclines, est toujours largement utilisée dans de nombreux types de cancers (du sein, leucémie, lymphome, sarcome). Cependant, sa cardiotoxicité provoque une diminution de la qualité de vie du patient et accroît la morbimortalité. La fréquence d'apparition de cette cardiotoxicité est fonction de la dose de doxorubicine, mais peut être estimée à 20 %, et même dépasser 50 % chez les patients âgés. Elle se traduit par des arythmies et l’installation d’une insuffisance cardiaque, parfois plusieurs années après l’exposition au traitement.
La prévention clinique de cette toxicité cardiaque des anthracyclines est pratiquement inexistante. De nouvelles options et stratégies thérapeutiques permettant de la réduire sont donc souhaitables. Dans cet esprit, un travail de recherche (1) a eu pour objectif de mieux comprendre les mécanismes de la cardiotoxicité de la doxorubicine et d'identifier de nouvelles cibles cardioprotectrices potentielles limitant les effets cardiaques délétères de cette molécule.
La protéine EPAC1, un facteur d’échange pour les petites protéines G, est directement activée par l’AMP cyclique en réponse à une stimulation bêta-adrénergique. Comme l’ont montré des travaux récents, elle est impliquée dans la réponse des cellules cardiaques à la doxorubicine. Celle-ci induit des modifications de l’expression/activité d’EPAC1 et de l’homéostasie calcique, la formation de complexes conduisant à des altérations de l’ADN, une dérégulation de la biogenèse et de l’activité de la chaîne respiratoire mitochondriale, conduisant in fine à l’apoptose des cardiomyocytes.
L’inhibition pharmacologique ou génétique d’EPAC1 réduit l’ensemble de ces altérations cellulaires in vitro et empêche le développement de la cardiomyopathie dilatée in vivo. De plus, contrairement à ce qui se passe dans les cellules cardiaques, l’inhibition d’EPAC1 augmente la toxicité de la doxorubicine envers les cellules tumorales (2).
(1) Belhadef A et al. Arch Cardiovas Dis (Suppl) 2020;12:243-4.
(2) Parnell E et al. Trends Pharmacol Sci 2015;36:203-214.
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