Des relations complexes

FA et déficit cognitif, quels liens ?

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Publié le 16/10/2020

La fibrillation atriale (FA) augmente le risque de troubles cognitifs, indépendamment des accidents vasculaires cérébraux symptomatiques. La prise en charge des facteurs de risque communs et l’anticoagulation, qui fait appel à un anticoagulant oral direct en première intention, permettent de réduire ce risque.

Un risque relatif plus élevé en cas d’AVC

Un risque relatif plus élevé en cas d’AVC
Crédit photo : Phanie

« Les relations entre la fibrillation atriale (FA) et les troubles cognitifs sont complexes », a rappelé la Dr Anne-Sophie Boureau, gériatre au CHU de Nantes. Ces deux pathologies ont une prévalence élevée chez les sujets âgés et elles sont volontiers associées.

Globalement, la FA multiplie par un facteur 1,5 le risque de troubles cognitifs, qu’ils soient d’origine vasculaire ou de type Alzheimer. Une méta-analyse récente a confirmé le lien entre la FA, les troubles cognitifs et la démence, lien retrouvé dans quasiment dans toutes les études. Et ce indépendamment des antécédents d’accident vasculaire cérébral (AVC) symptomatique, même si le risque relatif est toutefois plus élevé en cas d’AVC (RR 2,70).

Quel est le rationnel physiopathologique ? Ces deux pathologies partagent de nombreux facteurs de risque, l’âge bien sûr, mais aussi l’HTA, le diabète, le tabagisme, l’insuffisance cardiaque, le surpoids, les apnées du sommeil et les atteintes artérielles. La cascade FA, AVC et troubles cognitifs est bien connue et il ne faut pas oublier le rôle délétère des AVC silencieux, dont le risque est multiplié par deux par la FA. Ce type d'AVC touche plutôt les zones frontales et thalamiques et est associé au syndrome dysexécutif. Les variations du débit cardiaque induites par la FA, surtout lorsqu'elle est persistante, ont également un impact négatif via la réduction de la perfusion cérébrale.

Les AOD en première intention

Les études ont confirmé les bénéfices de l’anticoagulation sur le risque de troubles cognitifs, qui serait réduit d’environ 30 %. Chez le sujet âgé, le choix de l’anticoagulant doit se porter sur les anticoagulants oraux directs, administrés si besoin de façon sécurisée par une infirmière.

Comme l’a rappelé de son côté le Pr Olivier Hanon, gériatre et cardiologue à l'hôpital Broca (AP-HP), « les données des essais randomisés et de la vie réelle - dont le registre SAPHIR-AC dans 33 centres gériatriques, 25 % de patients de plus de 90 ans - ont confirmé que les AOD entraînent moins d’hémorragies cérébrales et d’hémorragies sévères que les AVK. Mais leur prescription nécessite une surveillance étroite de la fonction rénale, avec un contrôle de la clairance de la créatinine tous les trois mois et à chaque épisode aigu. Il ne faut pas avoir le réflexe d’une « faible dose pour tous », qui est un facteur de sous-dosage et donc d’AVC. Il est recommandé d'ajuster la posologie de l’AOD en fonction des critères qui sont propres à chaque molécule, ce qui ne facilite pas la tâche du clinicien ».

Le traitement par AOD est également pertinent sur le plan médico-économique, comme l’a confirmé un travail récent mené dans neuf EHPAD. Le prix du médicament est certes plus élevé que celui des AVK, mais les AOD réduisent les coûts indirects notamment en temps infirmier et en temps médecin et in fine, le coût total tend même à être moins élevé que celui du traitement par AVK.

D’après les communications de la Dr Anne-Sophie Boureau (Nantes) et du Pr Olivier Hanon (Paris).

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin