Dénutrition de l’enfant hospitalisé

Dépister et prendre en charge

Publié le 24/03/2010
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LES PROGRÈS RÉALISÉS dans le traitement de certaines pathologies graves font que doivent être pris en charge des enfants de plus en plus fragiles, chez lesquels restaurer un état nutritionnel correct est primordial. La dénutrition peut être antérieure à l’hospitalisation ou se développer pendant celle-ci ; elle est d’autant plus fréquente que l’hospitalisation est longue et que l’enfant est jeune, et augmente la morbimortalité et la durée d’hospitalisation.

Le dépistage doit être systématique à l’entrée de tout enfant, avec des moyens simples, puisqu’il suffit de le mesurer et de le peser pour se référer à l’indice de masse corporelle (IMC) et à différents indices anthropométriques, tels les critères de Waterlow (poids de l’enfant/poids attendu pour l’âge, taille mesurée/taille attendue pour l’âge et poids constaté/poids attendu pour la taille). En fonction de ces critères, on établit des courbes de croissance permettant de mettre en évidence un ralentissement ou une cassure du développement. Il est nécessaire, chez l’enfant, de tenir compte de la particularité dynamique, puisque l’absence de gain pondéral ou statural suffit à indiquer une croissance perturbée. Les critères signant la dénutrition sont stricts : un IMC inférieur au troisième percentile ou un rapport poids mesuré/poids attendu pour la taille inférieur à 80 % signent une dénutrition sévère.

Différents niveaux de prise en charge.

« La dénutrition demande un abord spécifique et s’inscrit désormais dans les soins de support, au même titre que le traitement de la douleur ou la prévention des infections nosocomiales », souligne le Dr Hugues Piloquet. L’état nutritionnel doit être évalué dès le diagnostic de pathologie chronique et tout enfant hospitalisé doit faire l’objet d’une surveillance stricte et constante tout au long de son séjour. Les grands centres ont mis en place des équipes transversales de prise en charge de la dénutrition, mais, dans les structures plus petites, les soins de support peuvent tout à fait être assurés par les pédiatres et les diététiciennes.

La dénutrition chez l’enfant est plus globale que chez l’adulte, puisqu’il est moins vulnérable aux carences protidiques du fait de son alimentation lactée prédominante. Il n’est donc pas conseillé de fournir un apport trop riche en protéines, d’où la nécessité de recourir à des supplémentations orales spécifiques aux enfants. La déshydratation ne s’associe à la dénutrition qu’en phase aiguë ; paradoxalement, l’enfant dénutri chronique est plutôt un peu trop hydraté.

Le type de prise en charge de la dénutrition s’adapte à sa sévérité, à la présence de troubles digestifs et aux capacités de récupération. En l’absence de pathologie de l’absorption intestinale, les voies orale ou entérale doivent être privilégiées. La première étape consiste à enrichir l’alimentation en ajoutant des éléments hypercaloriques ou à concentrer le lait de l’enfant. Si cela est insuffisant, on dispose de suppléments oraux spécifiques à la population pédiatrique. Ils sont maintenant remboursés en fonction de l’état nutritionnel et plus seulement en référence à la pathologie chronique initiale. Un progrès certain, puisque tout enfant dénutri peut désormais en bénéficier. On recourt à la nutrition entérale par sonde nasogastrique ou gastrotomie s’il existe des troubles de la déglutition ou une insuffisance d’apport dans les dénutritions graves. La voie parentérale n’est utilisée que dans les cas très particuliers où les fonctions intestinales sont très altérées.

D’après un entretien avec le Dr Hugues Piloquet, gastro-entérologie pédiatrique, Nantes, Groupe francophone d’hépatologie, gastroentérologie et nutrition pédiatriques.

Dr MAIA BOVARD-GOUFFRANT
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Source : Congrès Hebdo