Physiologiquement pluriquotidiens chez le jeune nourrisson, les pleurs sont dits excessifs quand un enfant âgé de moins de 4 mois a pleuré plus de trois heures par jour pendant au moins trois des sept derniers jours, selon les critères de Wessel modifiés.
Les pleurs paroxystiques révèlent une douleur aiguë et nécessitent un interrogatoire et un examen clinique rigoureux. De nombreuses pathologies peuvent être en cause : hernie inguinale, invagination intestinale, otite, infection urinaire…
En ce qui concerne les pleurs excessifs prolongés, la première cause en sont certainement les coliques du nourrisson, mais il peut aussi s’agir d’une œsophagite, d’un reflux gastro-œsophagien ou d’une allergie aux protéines de lait de vache, pour ne citer que les cas les plus fréquents.
Un nourrisson sur six
Une récente méta-analyse parue dans le Journal of Pediatrics, portant sur 5 670 articles et 8 690 enfants, a confirmé une fréquence élevée et stable des pleurs excessifs dus aux coliques, qui toucheraient en moyenne un bébé sur six.
De 17 % à 25 % des nourrissons âgés de 2 à 6 semaines ont des pleurs excessifs, 11 % de ceux de 8 ou 9 semaines, et 0,6 % de ceux de 10 à 12 semaines.
Les études soulignent aussi le risque de réactions violentes, voire de maltraitance de la part des parents. Celle, menée sur deux ans aux Pays-Bas, parue dans le Lancet en 2004 (1) montre, à partir de 3 259 questionnaires anonymes, que 6 % des parents déclarent avoir au moins une fois (1 sur 5 plusieurs fois) tenté de faire cesser les pleurs de leur bébé de moins de 6 mois par des manœuvres violentes. Les facteurs de risque relevés sont une famille monoparentale ou issue de l’immigration, des parents sans emploi.
« Les pleurs fréquents, même non graves, ne sont pas pour autant anodins, a souligné la Pr Véronique Abadie (Paris). Des risques sont possibles à court terme : arrêt de l’allaitement maternel, épuisement parental, dépression post-partum de la mère et du père… » Une étude de suivi de 587 mères a relevé un score de dépression élevé quatre fois plus fréquent chez les mères dont les bébés sont inconsolables (2).
Il existe également des risques à moyen et long terme : cinq études récentes ont montré des liens significatifs entre des pleurs excessifs et des troubles des conduites sociales et du développement (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) à long terme chez les enfants.
« C’est donc une situation à risque qui mérite davantage qu’une réassurance banale », a précisé la Pr Abadie. Pour intervenir, il faut bien comprendre que les coliques sont une entité hétérogène et multifactorielle. Leurs liens avec les migraines commencent à être mis en évidence dans différentes méta-analyses et études de cohorte. Il y aurait de cinq à six fois plus d’antécédents de coliques du nourrisson chez les migraineux. Les liens avec le microbiote intestinal sont aussi relevés. Une prise en charge est donc indispensable : médicaments, traitements physiothérapeutiques ou manuels (peau à peau, portage), changement de lait, guidance parentale.
Session « Pleurs excessifs du nourrisson : nouveaux éclairages » (1) Reijneveld SA et al. Lancet. 2004 Oct ; 364(9442):1340-42 (2) Radesky et al.Pediatrics. 2013 Jun;131(6):e1857-64
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