Un outil de gestion du stress

La médidation, entre mode et réalité

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Publié le 24/03/2020
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La méditation de pleine conscience (MPC) a le vent en poupe et suscite bien des intérêts, qui ne sont pas toujours thérapeutiques… Au-delà des effets de mode et de sa boboïsation, une session du congrès a fait le point sur ses effets et applications cliniques.
L'épineuse question de la formation des intervenants reste entière

L'épineuse question de la formation des intervenants reste entière
Crédit photo : phanie

Des programmes de mindfulness-based stress reduction (MBSR) ou de mindfulness-based cognitive therapy (MBCT) ont été développés dès les années 80. Leur objectif était d’apprendre à répondre au stress, sans réagir de façon automatique, afin d’acquérir plus de liberté dans la prise de décision.

Qu'en disent les études ? On a des arguments forts en faveur de la MBSR pour réduire la détresse psychologique et améliorer la qualité de vie chez les patients atteints d’affections somatiques, mais un effet moins évident sur les symptômes somatiques. La méditation de pleine conscience (MPC) s’est aussi montrée efficace sur la réduction et la prévention du stress, de l’anxiété et l’amélioration de la qualité de vie chez les personnes stressées, les professionnels de la santé et les étudiants.

Moitié moins de récidives dépressives

La MBCT permet d’acquérir des compétences métacognitives, c'est-à-dire d’arriver à une décentration par rapport aux ruminations. D’où un bénéfice certain dans la dépression, où la MPC diminue de 50 % le risque de récidives d’épisodes dépressifs par rapport à l’absence de traitement, un effet comparable à celui de la poursuite des antidépresseurs (AD) ou à la thérapie cognitive, ce dans un large éventail de patients en rémission complète ou partielle. L’association pleine conscience et AD n’apporte pas de bénéfice supplémentaire à l’un ou l’autre de ces traitements. On manque de données dans les troubles bipolaires.

Différentes études ont clairement mis en évidence que les trois composantes essentielles de la MPC, la régulation de l’attention, la régulation émotionnelle, l’acquisition de la conscience de soi et de son corps correspondent à l’activation de régions bien spécifiques du cerveau.

Des données de plus en plus convaincantes indiquent que le stress peut engendrer des maladies auto-immunes et qu’inversement, la MPC pourrait influencer favorablement le système immunitaire. Une métaanalyse d’essais randomisés a montré qu’elle diminue l’inflammation, améliore l’immunité cellulaire et ralentit le vieillissement biologique.

Des effets indésirables à ne pas négliger

Comme une étude menée chez 342 personnes l’a mis en évidence, la MPC n’est pas dénuée d’effets indésirables à type de symptomatologie anxieuse, de dépersonnalisation, de déréalisation dans 25 % des cas. Ils sont d’autant plus fréquents que la pratique est assidue et de longue durée, mais la plupart de ces effets indésirables sont légers et transitoires et n’entraînent ni arrêt de la pratique ni consultations.

La MPC est par ailleurs déconseillée dans les épisodes dépressifs ou les troubles psychotiques en phase aiguë, les troubles bipolaires non stabilisés, les séquelles psychologiques d’abus physiques, émotionnels ou sexuels et dans les états dissociatifs.

Une réduction de la souffrance avant tout

Au total, que peut-on en attendre ? « On oublie que la MPC peut constituer un complément, mais n’a jamais été conçue pour être un instrument thérapeutique, souligne le Pr Guido Bondolfi (Genève). Ce n’est pas une technique destinée à résoudre les problèmes mais un outil visant à réduire la souffrance en apprenant à modifier la relation avec soi et avec le monde et à acquérir des compétences pour mieux accueillir et accepter les symptômes. »

Bon nombre de questions restent cependant ouvertes : « il faut mieux préciser les cibles et les populations d’intervention, la justification du pourquoi faisant souvent défaut, ne pas confondre les promesses et l’efficacité, définir la durée des séances et celle de la pratique, et se poser la question épineuse de la formation des intervenants », souligne le psychiatre.

Session « Mindfulness : faut-il surfer sur la vague ? »

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du médecin