Alors que l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a placé l’ouverture et la transparence au cœur de sa nouvelle stratégie, le Dr Christelle Ratignier-Carbonneil, sa directrice générale adjointe, détaille les ambitions et les mesures qui accompagnent ce nouveau cap.
Comment la prise en compte des patients et de leurs expériences s’est-elle développée au sein de l’ANSM ?
L’Agence a toujours fait une place dans ses travaux aux différentes parties prenantes, que ce soient les patients ou les professionnels de santé. La démarche s’inscrit dans notre mission de service auprès des patients exposés aux produits de santé. Elle s’est installée depuis plusieurs années, notamment depuis 2011 avec la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire et la création de l’ANSM en 2012. L’implication des patients ne cesse depuis de s’accentuer. C’est aujourd’hui notre premier axe stratégique, établi dans notre contrat d’objectifs et de performance pour la période 2019-2023 signé avec la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Intégrer davantage les patients, qui sont experts de leur maladie, est une évolution d’importance pour répondre notamment aux attentes sociétales sur l’accès à l’innovation et la surveillance des médicaments et des produits de santé.
Pour y parvenir, nous avons notamment lancé, fin février, des appels à candidatures en vue de constituer les 15 nouveaux comités permanents de l’Agence, qui remplaceront les commissions consultatives, groupes de travail et comités techniques dont le mandat des membres s’achèvera fin juin 2019. Le recrutement de ces experts externes est ouvert aux représentants d'associations de patients et d'usagers. Ils seront désormais associés à tous les niveaux d’expertise de l’Agence afin d’intégrer systématiquement une approche « patients/utilisateurs » des produits de santé.
Quels apports attendez-vous de cette implication amplifiée des patients ?
Les patients apportent un éclairage important. À côté de l’expérience des professionnels de santé, l’expression de leur vécu apparaît complémentaire et nécessaire à une bonne compréhension. Une autre dimension relève de l’appropriation des mesures, favorisée par la décision partagée. Notre objectif est de rendre plus efficace les décisions de l’Agence. Cet aspect touche également la rédaction des documents d’information, qui doivent permettre de rendre l’information accessible au grand nombre. Notre conviction est que le partage permet de dégager une information didactique et compréhensible par tous.
Quelles autres mesures ou actions sont prévues ?
À l’occasion de décisions récentes, notamment sur les implants mammaires à risque de lymphomes anaplasiques à grandes cellules (LAGC), des représentants des associations de patients ont été auditionné par les Comités scientifiques spécialisés temporaires (CSST), aux côtés des professionnels de santé et d’autres experts. Il s’agit d’un temps d’échanges important entre les différentes parties prenantes.
Le Comité d’interface avec les associations de patients, qui se réunit en moyenne quatre fois par an, constitue également un espace important de dialogue.
Notre implication se traduit par ailleurs par une volonté de transparence et la publication de nos données. Depuis deux mois, nous mettons systématiquement en ligne, sur notre site, les demandes d’informations émises par la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs). D’ici la fin de l’année, les bases de données relatives à la vigilance seront mises à disposition. Une réflexion est en cours sur l’ouverture des données issues des essais cliniques. Les données brutes seront mises en perspective avec des éléments d’explication.
Notre ambition première est la sécurité des patients exposés aux produits de santé : garantir aux patients et aux professionnels de santé un accès à l’innovation et aux soins et dans des conditions d’utilisation sécurisées
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