Défiance contre la vaccination

Savoir pour agir

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Publié le 01/06/2017
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« Les professionnels et les associations doivent se mobiliser pour contrer la pensée "unique", pour montrer les initiatives positives et les pistes de développement de la vaccination en France. La vaccination grippale en entreprise, les campagnes d’information et de prévention auprès des plus fragiles, les expérimentations en pharmacie… Sont autant d’exemples concrets qui aideront à repositionner le vaccin dans un parcours de santé publique raisonné et cohérent ».

C’est en ces termes qu’Alain Coulomb, président de Coopération Santé, a ouvert le colloque interdisciplinaire intitulé « Vaccination : savoir pour agir ».

L’objectif de l'association (www.cooperation-sante.fr) est de promouvoir les coopérations entre professionnels de la santé, associations de patients et acteurs divers du monde de la santé. Le rendez-vous organisé à l’Institut Pasteur visait donc à rassembler des acteurs de la santé, d’horizons divers, pour réfléchir aux enjeux liés à la vaccination… et tenter – collectivement – d’apporter des réponses à la défiance qui se manifeste au sein de la population.

Résistances

Quand on analyse la situation dans les pays voisins, force est de constater que les Français témoignent d’une certaine réserve, voire méfiance avec comme corollaire des taux de couverture vaccinale moins bons que dans d’autres pays de l’Union européenne. Le taux de vaccination HPV (papillomavirus) en France est par exemple moitié moindre que celui de plusieurs voisins européens comparables. De même le taux de couverture vaccinale de la grippe pour les Français de 65 ans et plus était de 64,8 % pour la période 2008-2009, et de 48,3 % pour la période 2015-2016… alors même qu’au Royaume-Uni, il était de 75 % en 2014-2015.

Responsabilité collective

Ces postures « critiques » – largement observées par les professionnels de santé dans leur pratique quotidienne – sont également confirmées par une étude récente réalisée auprès des citoyens du pays. Le Pr Odile Launay, infectiologue (Université Paris Descartes, hôpital Cochin) et coordinatrice du groupe vaccination prévention de la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), mentionne ainsi les résultats d’une étude récente : 42 % des Français y ont exprimé leurs doutes sur l’efficacité des vaccins. Un chiffre particulièrement élevé.

Or, comme l’explique avec une grande clarté le Pr Philippe Sansonetti, chercheur à l’Institut Pasteur et professeur au Collège de France, la vaccination est un acte qui dépasse l’individu et le rapport bénéfice/risque doit être analysé au sens large. « La vaccination, acte individuel et collectif, est un des piliers de la santé publique : je me vaccine pour moi-même mais aussi pour les autres, car le fait même de se vacciner contribue à éradiquer la maladie, y compris pour les plus faibles, pour les plus démunis », souligne-t-il.

Sensibilisation

Ce colloque – riche en échanges, présentations et interrogations sur le rôle de chacun – a permis de mesurer le chemin qu’il reste à parcourir pour que ces messages, ces vérités et ces données scientifiques puissent sortir d’un cercle de convaincus et toucher le grand public. Jocelyn Raude, maître de conférences à l’École des hautes études en santé publique, sociologue chercheur à l’IRD a notamment montré comment la recherche du terme « vaccination » sur la Toile fait ressortir les contre-vérités et approximations avec des thèses « anti » ultra visibles… alors même que les arguments scientifiques en faveur de la vaccination sont quasi absents. Une communication externe – en parallèle des campagnes officielles – est donc à relayer et amplifier comme l’ont souligné, en conclusion, les organisateurs du colloque.

 

Anne-Lucie Acar

Source : Le Quotidien du médecin: 9585
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