En septembre 2020, la Commission des 1 000 premiers jours, groupe scientifique pluridisciplinaire composé de gynécologues-obstétriciens, sages-femmes, pédopsychiatres, psychologues, professeurs des universités etc., remettait son rapport au gouvernement après avoir été saisi en 2019 pour travailler sur cette période clé de l’enfance.
L’entretien prénatal précoce, pas assez répandu
Parmi les recommandations établies dans le document de 145 pages figurait notamment le renforcement de l’entretien prénatal précoce (EPP), « point d’entrée privilégié dans l’accompagnement et le suivi » d’après les auteurs du rapport.
Cette consultation, devenue obligatoire en mai 2020, dure environ 45 minutes et peut intervenir dès le 4e mois de grossesse. Elle est assurée par un généraliste, un gynécologue ou une sage-femme en libéral ou en PMI.
Pour le Dr Gilles Lazimi, médecin généraliste au centre de santé de Romainville et membre de la Commission des 1 000 premiers jours, « cette consultation exceptionnelle offre un temps d’échange avec la femme enceinte et permet au médecin de discuter avec elle de son projet de naissance, des difficultés qu’elle pourrait rencontrer, de ses attentes, d’éventuels problèmes sociaux ou de violences dont elle serait victime ».
Sur son site, l’Assurance maladie indique d’ailleurs que « s’il ne suit pas directement la grossesse, ou ne réalise pas l’entretien prénatal précoce, le médecin traitant est encouragé à s’assurer que ses patientes enceintes ont bien bénéficié de cet entretien ».
Malheureusement, selon le Dr Gilles Lazimi, ce temps de parole et d’échanges « est insuffisamment utilisé » : « Je dirais que seul un tiers des femmes enceintes en bénéficie ».
L’entretien postnatal précoce, effectif depuis septembre
Parmi les autres recommandations présentées dans le rapport de la commission d’experts figurait aussi la mise en place d’un entretien postnatal précoce « entre J8 et J30 ».
Cette consultation, concrétisée dans la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2022, est entrée en vigueur le 5 septembre dernier.
Assurée par un médecin ou une sage-femme, elle est remboursée à 70 % par l’Assurance maladie et doit avoir lieu entre la 4e et la 8e semaine qui suit l’accouchement. Si nécessaire, elle peut être reconduite entre la 10e et la 14e semaine après la naissance.
Pour le Dr Gilles Lazimi, cet entretien postnatal précoce est « un bon moyen de prendre le temps de parler avec les patientes, de les voir en interaction avec leurs enfants et d’identifier les problèmes qui peuvent se poser. Cela va être également très utile pour diagnostiquer une dépression du post-partum ».
Bientôt des visites à domicile avant et après accouchement ?
Même si cette consultation postnatale précoce n’est aujourd’hui pas encore assez connue des professionnels de santé et pas assez promue par les pouvoirs publics, les mesures pour renforcer l’accompagnement et le suivi des femmes sur la période des « 1 000 premiers jours » semblent progressivement se mettre en place.
Depuis la remise du rapport il y a maintenant deux ans, une application mobile à destination des parents a été créée ainsi qu’un site ressources dédié. Se mettent également en place des structures, réunissant parents et professionnels, baptisées « maisons des 1 000 premiers jours ».
Pour passer du concept à l’action, il est maintenant indispensable « d’engager des campagnes d’information et de formation » à destination du grand public et des professionnels de santé, insiste le Dr Gilles Lazimi.
Comme préconisé dans le rapport, le généraliste défend également la mise en place de visites à domicile systématiques avant et après l’accouchement, assurées par les médecins traitants. « Les généralistes connaissent bien leurs patients. Des visites à domicile leur permettraient d’avoir une meilleure vision de leur environnement », résume-t-il.
Une commission présidée par Boris Cyrulnik
Lancé par l’Unicef, le concept scientifique des « 1 000 premiers jours » consiste à dire que la période allant de la grossesse jusqu’aux 2 ans de l’enfant est déterminante pour le bon développement et la construction de l’enfant. Selon les scientifiques, cette période conditionne la santé et le bien-être d’un individu tout au long de sa vie. En 2019, Emmanuel Macron a missionné une commission d’experts, présidée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, pour établir des recommandations sur le sujet et faire de ce concept un axe prioritaire de sa politique familiale.
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