– Ne vous inquiétez pas.
La cave, à peu près rangée, ressemble à une chambre d’hôpital et à un laboratoire. Une expérience a lieu ici.
– L’E.M.I. est une discipline exigeante vous savez, rien ne doit être laissé au hasard. Je vais vous expliquer. En règle générale, je ne le fais pas mais avec vous, je ferai une exception. Je vais vous injecter cinq cents gammes de Sufentanyl en intraveineux ce qui déclenchera un arrêt respiratoire dans un premier temps, puis un arrêt cardiaque. Pour vous ramener, je pratiquerai un massage cardiaque et une ventilation avec de l’oxygène. De la Naloxone également en intraveineux (en quantité suffisante pour annuler les effets du Sufentanyl). Vous reprendrez une activité cardiaque et une respiration spontanée. Vous serez vaseux, très fatigué mais ça ira, ne vous inquiétez pas. On y va ?
***
Plus tôt.
– Un café ?
– Volontiers.
L’homme qui vient de proposer un café à son hôte se rend dans la cuisine mais ne s’occupe ni des filtres, ni du café : il est habilement caché dans l’embrasure de la porte du salon et observe. Celui qui l’attend s’est levé et regarde les livres dans la bibliothèque, ouvre des tiroirs. Soudain :
– Excusez-moi, je ne vous ai pas demandé si vous souhaitiez du suc…
Avant que son visiteur n’ait le temps d’amorcer un geste, il le saisit et lui tamponne le nez, muni d’un mouchoir chloroformé. Comme à chaque expérience, l’évanouissement est instantané. Il le couche sur le canapé et fouille dans sa veste. C’est bien ce qu’il pensait.
***
Tout se passe normalement. Il espère que le témoignage sera différent, il y croit. Laissant le temps nécessaire à ce nouvel expérienceur de récupérer, il allume son iPod et des petites enceintes sort une musique douce. Qui ne le calme pas.
Plus tard.
– Alors ?
Désorienté, l’officier Le Balcon met quelques secondes à comprendre comment il s’est retrouvé là.
***
Devant la maison.
– Faut y aller, c’est pas normal.
– Tu crois ? Il a dit : « pas d’intervention sans un signe de ma part ».
– OK, mais c’est beaucoup trop long, tant pis, on y va.
Les deux policiers décident de faire le tour de la résidence. Quand ils arrivent dans le jardin, ils aperçoivent un soupirail. Malgré la poussière accumulée sur la petite lucarne, ils voient l’horreur. Leur chef, allongé sur un brancard, est apparemment interrogé par un homme qui porte une blouse blanche.
– Je vais tenir le mec en joue et toi tu entres avec les autres, à mon avis tu peux y être en dix secondes. La porte d’entrée doit être en face de l’escalier qui descend à la cave.
– OK.
En un instant, sans avoir le temps de comprendre ce qu’il se passe, le chercheur-fou est maintenu au sol par l’autre partie de l’équipe qui, le pronostic était bon, mit une poignée de secondes pour pénétrer dans la maison et foncer jusqu’à l’improbable salle d’opération.
***
Soutenu par ses adjoints, Le Balcon veut voir l’agresseur maintenant maîtrisé. Menotté et inoffensif, il hurle :
– Dites-moi ce que vous avez vu ! Dites-moi ce que vous avez vu !
– Rien de ce qui est habituellement observé. Ça vous passionnerait.
***
Confortablement installé dans son fauteuil, Patrice Le Balcon regarde un épisode de Johnny Staccato, sa série préférée. En vingt minutes, le héros trouve les délinquants et rentre chez lui, coiffé de son chapeau mou qui le protège de la pluie.
Cette fois-ci, il ne connaîtra pas la fin.
– Patron, désolé de vous déranger mais ce serait bien que vous veniez là.
– Qu’est-ce qu’on a ?
– Je préfère vous en parler de vive voix, je n’ai jamais vu ça.
Fichu métier.
Une nouvelle histoire courte dans notre édition du 13 mars
Avec la collaboration de
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