Expression somatique cutanée d’un désordre psychiatrique souvent grave, la pathomimie est une maladie factice entièrement provoquée dans un état de conscience claire par le malade lui-même sur son revêtement cutanéomuqueux, mais la motivation est inconsciente.
L’expression la plus grave est le syndrome de Munchhausen, survenant chez des malades mythomanes s’infligeant quelquefois des lésions graves, menaçantes pour leur vie. Les pathomimies ont deux caractéristiques : l’absence de motif rationnel précis et le secret que garde le malade à propos de sa propre responsabilité dans la survenue de sa dermatose. Elles doivent donc être distinguées des simulations, lésions induites dans un but de bénéfice social, et des attitudes compulsives (excoriations névrotiques par exemple), généralement reconnues comme telles par le malade, qui admet qu’il ne peut s’empêcher de les provoquer. Les pathomimicries sont également distinctes et de meilleur pronostic – il s’agit de l’induction de poussées de maladies cutanées connues par exposition volontaire à l’agent responsable : auto-entretien d’un ulcère de cause connue, contact avec un allergène identifié dans l’eczéma (parfum, lanoline…), reprise d’un médicament incriminé dans la toxidermie.
La prédominance de la pathomimie est nettement féminine (74-88 %). Un diagnostic précoce est essentiel afin de limiter les gestes agressifs qui renforcent la pathologie. Les manifestations les plus fréquentes sont des ulcérations, excoriations, des nécroses cutanées associées à un érythème, des croûtes, des ecchymoses, des œdèmes segmentaires, des alopécies, des dystrophies unguéales… Leur aspect est très variable car il dépend des moyens utilisés ; produits caustiques, brûlures thermiques, lacérations, injections de produits divers, pose de garrots, ventouses…
Un aspect bizarre
« Un vulnologue avisé reconnaît aisément une pathomimie cutanée : la dermatose ne ressemble à rien de connu et son aspect évoque d’emblée une dermatose factice artificielle », a expliqué le Dr François Truchetet (Metz-Thionville). La morphologie et la topographie des lésions orientent le diagnostic. La dermatose a une apparence bizarre : elle est linéaire, géométrique, contraste nettement par rapport à la peau saine.
Les lésions concernent les zones habituellement accessibles aux mains : visage, membres supérieurs, inférieurs, même s’il existe quelquefois la complicité d’un partenaire (« folie à deux »). Chez l’enfant, les limites de l’hétéropathomimie peuvent être floues, avec des sévices. Les conditions d’apparition peuvent aussi guider le diagnostic, car elles sont soudaines.
L’interrogatoire est souvent incohérent et il existe un vagabondage médical. Enfin, la personnalité du malade peut être évocatrice, mais le désordre psychiatrique est rarement évident. « La pathomimie est la première extériorisation d’une maladie psychiatrique : c’est un appel à l’aide », a précisé le Dr Truchetet.
Elle touche des femmes éduquées, socialement ou affectivement isolées (ou craignant de l’être). Il peut exister une instabilité émotionnelle, une agressivité, un état dépressif, une névrose ou psychose… « Le diagnostic est facile à évoquer, mais difficile à affirmer car il y a toujours la crainte de laisser passer une maladie organique et il n’est pas aisé de penser que le malade a une responsabilité dans la survenue de sa maladie », a-t-il ajouté.
Il est essentiel, mais difficile, d’articuler les soins dermatologiques avec l’objectif psychiatrique. La prise en charge ne doit pas être inquisitoire, car faire avouer peut entraîner une décompensation psychiatrique grave ou même le suicide. Il faut être rassurant, compréhensif. La relation thérapeutique doit être une attitude de connivence, de complicité où il s’agit de montrer au patient que l’on sait sans lui dire (ne pas forcer à l’aveu et ne pas être dupe). C’est un long travail d’approche et de suivi. 30 à 75 % des malades sont des récidivistes. 30 à 60 % des malades ont une affection psychiatrique caractérisée où domine la dépression avec tentative de suicide.
D’après la communication du Dr François Truchetet (Metz-Thionville)
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