L'étude Coviskin, sous l’égide de la Société Française de Dermatologie (SFD), a étudié quelque 300 lésions cutanées acrales observées lors de la première vague, une série publiée dans le « British Journal of Dermatology » (1).
Il s'agissait d'engelures au niveau des orteils pour la majorité d’entre elles, survenues en mars et avril chez des sujets jeunes, dont une moitié présentait des signes cliniques aspécifiques suspects (toux, fièvre) et l’autre était asymptomatique. L’objectif de ce recueil était de déterminer l’existence ou non d’un lien entre ces engelures et l'infection Covid-19, de telles manifestations cutanées étant peu fréquentes en période printanière.
La RT-PCR s’est révélée positive seulement chez sept des 121 cas testés et la sérologie, réalisée en moyenne trois semaines après le début des symptômes, était positive chez sept des 75 cas testés. L’évolution des lésions a été favorable dans tous les cas, soit spontanément soit après application de crème cicatrisante ou de dermocorticoïdes, avec des conseils de protection contre le froid et l’humidité.
« Il est difficile d’affirmer qu’il existe un lien direct à ce stade, précise la Pr Beylot-Barry, du CHU de Bordeaux et présidente de la Société française de dermatologie (SFD). Cependant, les données publiées par les équipes scientifiques espagnoles ne permettent pas d’exclure totalement l’existence d’un lien potentiel en raison de la positivité de la RT-PCR chez un plus grand nombre de patients ».
Quelques hypothèses ont été avancées : des anomalies du système immunitaire (interféron) ou certains comportements inhabituels pendant la période de confinement (immobilité, déplacement pieds nus à la maison). Beaucoup d’inconnues demeurent et il faudra observer si de nouveaux cas en série d’engelures apparaissent à l’automne ou cet hiver, « l’épidémie d’engelures » ayant actuellement cessé.
D'autres manifestations très polymorphes
Actuellement, au vu de la littérature (près de 1 000 cas de lésions à type d’engelure), aucun lien direct entre engelure et Covid-19 n’a pu être démontré ni expliqué. Ces engelures sont à distinguer des graves nécroses liées à des phénomènes thrombotiques qui surviennent chez les patients infectés par le SARS-CoV-2 et hospitalisés en réanimation, a rappelé la Pr Beylot-Barry. Un certain nombre d’autres manifestations cutanées très polymorphes à type d’exanthème maculo-papuleux, d’urticaire, de livedo, d’éruptions vésiculeuses a été décrit dans des recueils espagnols, italiens et français. Aucune manifestation n’est vraiment spécifique et ces éruptions sont en majorité celles que l’on rencontre classiquement dans les infections virales.
Des perturbations cutanées liées aux gestes barrières (irritation liée au nettoyage intempestif des mains, aggravation d’une dermatose préexistante/acné dermite séborrhéique liée au masque) ont également été rapportées. Des fiches pratiques destinées aux soignants et aux patients ont été élaborées par la SFD afin de les prévenir et de les traiter (www.sfdermato.org). « Ces quelques complications, évitables pour la plupart d’entre elles, ne peuvent en aucun cas être considérées comme des arguments pour éviter le port du masque », a conclu la Pr Beylot-Barry.
*Le Cleach L. et al. Most chilblains observed during the COVID-19 outbreak occur in patients who are negative on PCR and serology testing. Br J Dermatol 2020
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