Au ministère de l'Intérieur, le Dr Florence Foullon est médecin coordonnateur national de la médecine préventive, Chef de service médical de prévention. Elle analyse pour « le Quotidien » les spécificités de son activité.
LE QUOTIDIEN : Comment accompagnez-vous les policiers dans ce climat d’état d’urgence et de risques permanents d’attentats ?
Dr FLORENCE FOULLON : Les médecins de prévention conseillent celles et ceux qui sont à l’avant-poste sur les risques spécifiques. Après coordination avec les services, nous sommes en mesure de suivre les agents directement ou indirectement impactés. Il peut s’agir d’impacts physiques et/ou post-traumatiques graves. Nous veillons notamment à détecter ceux dont les symptômes rampants persistent au-delà de deux mois après l’événement. En dehors de ces cas urgents, tous les intervenants scrupuleusement répertoriés devront être vus en consultation par le médecin de prévention dans les 6 mois, et ce autant de fois que nécessaire. Avec les risques d’attentats, la disponibilité de certains policiers pour se rendre aux visites médicales est parfois réduite. Leurs charges de travail et les horaires atypiques renforcent tout l’intérêt de ce suivi médical rapproché et certains médecins de prévention n’hésitent plus à procéder à des visites médicales de nuit pour tenir compte de ces contraintes.
La prévention a-t-elle sa place dans la Police nationale ?
Depuis 18 ans, je constate une nette évolution de la médecine de prévention, obligatoire au sein de la Police nationale depuis 1995. Nous assurons le suivi médical de 140 000 agents et effectuons chaque année environ 45 000 visites médicales obligatoires et à la demande. La périodicité de ces visites dépend d’abord des risques professionnels particuliers attachés aux différents postes. Les visites demandées par les policiers eux-mêmes sont en constante augmentation. Nous répondons à toutes ces demandes qui expriment un besoin réel et nous permettent de procéder à une détection précoce des difficultés physiques et du mal-être au travail.
Comment à votre niveau, faites-vous progresser la prévention des suicides dans la police nationale ?
De nombreux cas de mal-être sont détectés, puis suivis à l’occasion des visites médicales. Le médecin de prévention, tenu au secret médical, dispose aussi d’une indépendance technique lui permettant d’agir, au sein de l’administration, dans l’intérêt exclusif de la santé de l’agent. Les policiers peuvent donc se confier à nous. Le dispositif de prévention du suicide régulièrement renforcé au sein de la Police nationale a même fait l’objet d’un plan ministériel articulé autour de 24 mesures en 2014. Depuis, les effets des attentats et leurs impacts possibles sur les policiers intervenants ont démontré toute l’utilité de ces mesures. Chargée de la prévention de la santé physique et psychique des agents au travail, j’ai contribué à l’élaboration et à la mise en œuvre de ce dispositif alliant les compétences des médecins, psychologues et assistants des services sociaux, pour mieux protéger celles et ceux qui nous protègent. Parmi les risques particuliers, l‘interdiction de détenir son arme en dehors des heures de service n’a finalement pas pu être maintenue, en raison de la multiplication des attaques terroristes, en lien avec leurs nouveaux modes opératoires.
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