LA PRISE en charge des patients atteints d’ostéoporose comprend diverses étapes : une identification sensible et spécifique des patients à haut risque fracturaire, l’administration de traitements dont l’efficacité antifracturaire a été prouvée dans des essais randomisés bien conduits et satisfaisant tous les critères de la médecine basée sur les preuves, une sécurité d’emploi absolue à long terme, des conditions d’emploi assurant une adhésion maximale au traitement.
Ce dernier critère regroupe à la fois l’observance du traitement et sa persistance sur la durée, c’est-à-dire la durée effective du traitement par rapport aux recommandations usuelles et à la prescription du médecin. Pour rappel, l’observance est quant à elle définie par le respect des modalités de prise du médicament (horaires des prises, à jeun ou non…) et la régularité de cette prise (oublis).
L’observance peut théoriquement se mesurer grâce à l’indice MPR (Medication Possession Ratio), qui se calcule en faisant le rapport entre le nombre de comprimés prescrits sur une période donnée et le nombre de comprimés qui auraient dû être pris. Lorsque le MPR est supérieur à 80 %, l’observance est considérée comme satisfaisante, notamment dans le cadre d’essais cliniques.
Quant à l’adhésion au traitement, elle est loin d’être parfaite dans la « vraie vie », ce qui compromet l’efficacité d’un traitement anti ostéoporotique au long cours. Mais quand parle-t-on de long cours dans le cadre d’un tel traitement ? Dans les essais cliniques randomisés versus placebo, l’étude initiale s’étale en général sur 1,5 à 5 ans… Puis des extensions évaluent la poursuite du traitement : à 10 ans pour l’alendronate, à 7 ans pour le risédronate et à 10 ans pour le ranelate de strontium.
En pratique, la décision de poursuivre le traitement doit être faite en évaluant à la fois les effets antifracturaires des traitements et leurs effets indésirables possibles.
L’analyse de la littérature montre que, dans les études randomisées versus placebo, le taux de persistance varie entre 52 % et 92 % et l’observance (MPR> 80 %) entre 86 % et 96 %. En revanche, dans les études observationnelles, reflétant la pratique quotidienne, il apparaît que l’adhésion au traitement est beaucoup plus faible. Au terme d’un an de traitements administrés par voie orale (antiostéoporotique, supplémentation vitamine D-calcium), le taux de persistance varie entre 20 % et plus de 60 %… Il est nettement plus bas après 2 à 3 ans de traitement.
Les causes de la mauvaise adhésion sont nombreuses et complexes : elles peuvent être spécifiques des traitements (mode d’administration, conditions d’administration parfois contraignantes, effets secondaires, coût…), être liées aux patients (âge, absence de motivation, peur des effets secondaires, méconnaissances des risques, perte de mémoire, incompréhension, comorbidités, polypathologies, croyances personnelles…) ou au médecin prescripteur (suivi, compétence…) et ce sans oublier les problèmes sociaux (coût, difficulté de prise en charge et de remboursement, disponibilité des infirmières…)
L’amélioration de l’adhésion aux traitements antiostéoporotiques passe en premier lieu par une meilleure information du patient lui permettant de comprendre avec plus d’acuité les enjeux des traitements antiostéoporotiques, leur maniement et leur surveillance par les marqueurs de la résorption osseuse.
La fréquence d’administration des traitements influe également sur l’observance ; c’est ainsi que le passage d’une administration quotidienne des biphosphonates à une prise hebdomadaire s’est accompagné d’une amélioration d’environ 20 % de l’observance mesurée par le MPR, indépendamment de l’âge, de la gravité de l’ostéoporose ou du mode de prise en charge. Pour le Pr P. Geusens, améliorer l’adhésion au traitement et par voie de conséquence, augmenter son efficacité anti-fracturaire est aujourd’hui possible compte tenu de la large gamme de médicaments disponibles, des différentes formes d’utilisation et en prenant en considération le profil des patients et les facteurs liés au médecin et/ou à la société qui retentissent sur l’observance thérapeutique. Cependant davantage de données sur des facteurs modifiables seront nécessaires pour améliorer encore l’adhésion thérapeutique , préoccupation majeure en pratique quotidienne.
Geusens Piet (Pays-Bas). Osteoporosis treatment in the long run. Abstract N° SP0150.
Article précédent
Prévenir la progression
Article suivant
Des avancées qui conduisent à l’exploration de nouvelles pistes
Jeux de mains
L’adalimumab optimise les résultats à long terme
Les leçons des études
De l’inflammation à l’ossification : le chaînon manquant
Des patients insuffisamment traités, de nouveaux médicaments prometteurs
Les douleurs de l’adulte influencées par le poids de l’enfance
Les recommandations de l’Initiative 3 E
Prévenir la progression
Améliorer l’adhésion au traitement pour prévenir les fractures
Des avancées qui conduisent à l’exploration de nouvelles pistes
L’entraînement cardiovasculaire dans la spondylarthrite ankylosante
Penser aux formes neuropsychiatriques
Un os plus solide
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024