LES EXEMPLES abondent, à commencer par le plus violent d’entre tous, le coup d’arrêt que la justice américaine a infligé à la carrière de Dominique Strauss-Kahn, président de la République potentiel. Georges Tron, placé en garde à vue dans une affaire où trois plaintes pour harcèlement sexuel ont été déposées contre lui, a déjà quitté son poste de secrétaire d’État à la Fonction publique et ne devrait pas rester longtemps maire de Draveil. Jacques Chirac, même s’il est retraité, n’échappera pas à un procès pour emplois fictifs à la mairie de Paris, qui aura lieu en septembre prochain. Une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de la tête de Christine Lagarde qui pourrait comparaître devant la Cour de Justice de la République à propos des indemnités versées à Bernard Tapie dans l’affaire de la vente d’Adidas. Éric Woerth n’en a pas fini avec la justice qui veut savoir dans quelles conditions un morceau de la forêt de Compiègne a été vendu à une société de courses hippiques.
Nombreuses affaires.
Ce sont des dossiers qui occupent le devant de la scène. Ils succèdent à de nombreuses affaires, comme celle d’Elf, qui a failli emporter Roland Dumas, celle du financement du Parti socialiste qui a coûté une condamnation à son ancien trésorier, Henri Emmanuelli (bien qu’il n’y ait eu, en l’occurrence, aucune forme d’enrichissement personnel), celle où a été impliqué Dominique Strauss-Kahn au sujet de ses émoluements d’avocat, et qui l’a contraint à quitter le gouvernement de Lionel Jospin, celles où les libertés que des ministres avaient prises avec les deniers de l’État leur ont valu une prompte démission forcée, même s’ils n’ont pas abouti à une comparution devant un tribunal, celle (toujours la Mairie de Paris) qui a empêché Alain Juppé de se présenter à la candidature à la présidence de la République il y a quatre ans. La liste, en tout cas, est loin d’être exhaustive.
LE STRICT RESPECT DE LA LOI EST PARTIE INTÉGRANTE DE LA DÉMOCRATIE
Le phénomène est certainement d’inspiration américaine et ce n’est pas par hasard si c’est à New York que Dominique Strauss-Kahn est entré en collision avec la police, puis la justice. Il peut apparaître comme excessif, et dangereux pour le bon fonctionnement de nos institutions, dans la mesure où il écarte de la gestion des affaires des hommes ou des femmes parfois difficiles à remplacer. Il peut être considéré comme une « mode » ou un moment de l’évolution des mœurs. Il peut aussi tourner à vide et résulter en une grave injustice quand la personne poursuivie est blanchie en définitive par la justice mais n’est plus en mesure de reprendre sa carrière à l’endroit précis où elle l’avait laissée. La Cour criminelle de New York nous a démontré, non sans une certaine violence et non sans une procédure qui risque de nous sembler arbitraire (dans la mesure où elle favorise les droits de la victime présumée au détriment de ceux du coupable présumé), qu’elle n’établit aucune distinction entre puissants et misérables. Elle va même au-delà, puisqu’elle s’acharne avec cruauté (et même avec cynisme quand le procureur veut exalter son propre professionnalisme) sur l’agresseur présumé.
La procédure judiciaire appliquée à tous les citoyens de la même manière a néanmoins l’avantage de rappeler aux délinquants de la politique que le mandat qu’ils ont reçu du peuple est trop respectable pour être négligé ; qu’il accroît sensiblement les devoirs de l’élu ; qu’il lui donne une responsabilité pour laquelle il doit nourrir un immense respect ; que, au fond, le personnage public détenteur de ce mandat pervertit le fonctionnement de la démocratie s’il s’accorde à lui-même des passe-droits dont ses électeurs ne bénéficient d’aucune manière ; qu’il va donc à l’encontre du système dont il devrait être le champion naturel ; que, si les exemples de privilèges ou de contournement du droit se multiplient, ils font de la démocratie une vaste plaisanterie, et traduisent non pas le dévouement et la sincérité de l’élu, mais son cynisme.
Ce à quoi l’on assiste depuis environ deux décennies est une moralisation croissante de la vie publique, très vivement souhaitée par un électorat furieux de l’usage que quelques élus font des pouvoirs qui leur sont délégués. D’une part, il arrive au bon peuple de regretter que la justice abatte des chênes comme Chirac ou DSK, précisément parce que leur popularité et les qualités qu’on leur prête sont en contradiction avec les actes qu’on leur reproche ; d’autre part, selon le camp auquel on appartient, on se réjouit souvent de la chute d’un homme (ou d’une femme) parce qu’il ou elle appartient à l’autre camp, ce qui révèle le revanchisme de beaucoup de comportements. Ce sont deux extrêmes, entre lesquels la justice, qui doit prouver tous les jours son indépendance, doit trouver le juste milieu.
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