Faut-il arrêter la supplémentation en vitamine D ?

Publié le 06/12/2018
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vitamine D

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Crédit photo : Phanie

Depuis que les seuils biologiques censés signaler l’existence d’une carence en vitamine D ont été abaissés, la supplémentation en vitamine D est devenue une pratique médicale courante. Hors carence réelle exprimée par des taux plasmatiques très bas de vitamine D, les bienfaits cliniques attribués à cette vitamine restent cependant purement théoriques lorsque le patient n’est pas en situation de rachitisme. Ainsi, une méta-analyse récente (1) a pris en compte tous les essais thérapeutiques contrôlés ayant évalué l’apport de la vitamine D sur le risque osseux. Sa conclusion est claire : il ne prévient pas les fractures ou les chutes, et n’a pas d’effet cliniquement significatif sur la densité minérale osseuse, que les doses soient faibles ou élevées. Qu’en est-il sur d’autres bienfaits supposés, tels que les risques cardiovasculaires (CV) et de cancer ?

Pas de bénéfice selon l’étude VITAL

L’étude VITAL (Vitamin D and Oméga-3 Trial) a évalué en double aveugle, contre placebo, l’effet d’une dose quotidienne de 2 000 UI de vitamine D chez 25 871 patients en prévention CV primaire, définis comme à haut risque CV car âgés d’au moins 50 ans pour les hommes et 55 ans pour les femmes (2). Il n’y avait pas de critères biologiques d’inclusion, notamment en matière de taux de vitamine D plasmatique.

Au terme d’un suivi médian de 5,3 ans, l’incidence des événements du critère primaire (décès CV, infarctus du myocarde non fatals, AVC non fatals) n’a pas été significativement différente entre les groupes comparés : 396 événements dans le groupe sous vitamine D, et 409 dans le groupe sous placebo (HR : 0,97 ; IC95 % : [0,85 – 1,12] ; = 0,69). De même, l’incidence des cancers n’a pas été différente entre les groupes comparés (793 sous vitamine D et 824 sous placebo ; HR : 0,96 ; IC95 % : [0,88 – 1,06] ; = 0,47), qu’il s’agisse de cancers mammaires (HR : 1,02 ; IC95 % : [0,79 – 1,31]), prostatiques (HR : 0,88 ; IC95 % : [0,72 – 1,07]) ou colorectaux (HR : 1,09 ; IC95 % : [0,73 – 1,62]). Aucune différence n’a été constatée entre les groupes concernant l’incidence des décès par cancer (HR : 0,83 ; IC95 % : [0,67 – 1,02]).

Le résultat a été homogène concernant les cancers et les événements CV majeurs, que le taux de vitamine D plasmatique à l’état de base des patients soit inférieur ou supérieur à 20 ng/mL.

Les résultats de cette étude associés à ceux de la méta-analyse concernant le risque osseux permettent de conclure que la supplémentation en vitamine D ne diminue ni le risque d’événements CV majeurs, ni le risque de cancer, ni le risque osseux. Est-il temps d’en finir avec la supplémentation large en vitamine D, qui n’a pas de fondement scientifique validé ?

(1) Bolland MJ et al. Effects of vitamin D supplementation on musculoskeletal health. A systematic review, meta-analysis and trial sequential analysis. Lancet Diabetes Endocrinol. 2018 Nov;6(11):847-858

(2) Manson JE et al. Vitamin D supplements and prevention of cancer and cardiovascular disease. N Engl J Med. 2018 Nov 10. DOI : 10.1056/NEJMoa1809944


Source : Le Quotidien du médecin: 9708