Les avancées dans le cancer colorectal métastatique ont été marquées par l’arrivée des anti-VEGF (bevacizumab, aflibercept) et des anti-EGFR (cetixumab, panitumumab). D’abord utilisés chez tous les patients métastatiques, ils ont vite été réservés aux 60 % de tumeurs sauvages après la mise en évidence, en 2009, de l’absence de bénéfice chez celles ayant un gène KRAS muté sur l’exon 2. En 2013, on s’est aperçu que 17 % des tumeurs KRAS sauvages présentaient d’autres mutations plus rares (exons 3-4 de KRAS et 2-3-4 de NRAS) mais tout autant réfractaires aux anti-EGFR. Résultat, au total 50 % de tumeurs colorectal métastatiques sont mutées RAS (mutations sur exons 2-3-4 de KRAS ou NRAS) et ne relèvent plus aujourd’hui d’un anti-EGFR. Avec à la clé un nouveau saut de survie, conséquence d’un meilleur ciblage des répondeurs. Soit une survie médiane d’environ 30 mois de survie chez les sauvages - 50 % des cancers métastatiques - versus 25 mois chez les mutés.
Quant à l’ordre préférentiel à adopter pour ces biothérapies, il semble indifférent. Si les deux options thérapeutiques sont envisageables (tumeurs RAS sauvages), associer la chimiothérapie par FOLFOX (5FU/Oxaliplatine) ou FOLFIRI (5FU/Irinotecan) d’abord à un anti-VEGF ou d’abord à un anti-EGFR ne change pas la survie. C’est ce qu’une vaste étude américaine présentée cette année à l’ASCO a montré (1). Que l’on commence par l’une ou l’autre de ces thérapies ciblées, les survies ne diffèrent pas (29 mois versus 30 mois [RR = 0,92 ; 0,78-1,09 ; p = 0,34]). À 7 ans de suivi, après chirurgie/chimio/biothérapie, 11 % de patients sont considérés comme guéris, leur survie excédant les 5 ans.
Les anti-BRAF (vemurafenib, dabrafevib) après avoir montré leur efficacité dans les mélanomes métastatiques (BRAF mutés une fois sur deux) pourraient ouvrir de nouvelles perspectives dans les 8 % des cancers colorectaux BRAF mutés. D’autant que cette mutation est de très mauvais pronostic - tumeur plus agressive, survie autour de 12 mois sous chimiothérapies conventionnelles - même si ces tumeurs sont toujours sauvages pour RAS. Or cette année à l’ASCO plusieurs essais de phase I, associant un anti-BRAF avec un anti-EGFR (cetuximab ou panitumumab) plus ou moins un troisième type de thérapie ciblée (anti-MEK ou anti-PI3 kinase) ont donné des résultats très intéressants (2).
«Dans les cancers colorectaux, avec les avancées thérapeutiques liées au démembrement moléculaire des tumeurs, qui lui-même continue à progresser (cf le consensus d’experts présenté à l’ASCO [3]), on s’achemine donc de plus en plus vers un traitement à la carte », conclut le Pr André.
Entretien avec le Pr Thierry André (hôpital Saint Antoine, Paris)
(1) Abstract LBA3, ASCO 2014
(2) Abstracts 3514, 3515, 3516, 3517 et 3518 ; ASCO 2014
(3) Abstract 3511 ; ASCO 2014
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