LA SURVENUE d’une fibrillation atriale (FA) après une intervention de chirurgie cardiaque (coronaire, valvulaire ou autre) est fréquente. Elle a été rapportée, suivant les séries, chez 10 à 65 % des patients. Cette incidence variable rend compte de la diversité des patients pris en compte selon les séries puisque l’incidence dépend notamment de l’état cardiaque sous-jacent, de l’âge des patients et du type de chirurgie. La survenue d’une FA en postopératoire est associée à une plus grande durée de séjour hospitalier et à une augmentation des coûts de prise en charge.
Les causes d’une FA postopératoire sont multiples et les mécanismes impliqués comprennent l’inflammation, notamment péricardique, des modifications de tonus sympathique et des variations du volume plasmatique, parfois une ischémie myocardique. Les cibles thérapeutiques sont donc nombreuses mais depuis quelques années, la part inflammatoire du mécanisme causal a été la cible principale des traitements évalués. Plusieurs études ont ainsi montré que la prescription de corticoïdes ou de statines peut réduire l’incidence de la FA précoce après une chirurgie cardiaque.
La colchicine a une action anti-inflammatoire et son coût étant modique, il a paru utile à une équipe italienne d’évaluer si ce traitement simple peut prévenir la survenue d’une FA précoce après une intervention de chirurgie cardiaque.
Un traitement simple.
L’étude COPPS (Colchicine for the prevention of post-pericardectomy syndrome), multicentrique (six hôpitaux italiens) en double aveugle contre placebo, a été conduite pour répondre à deux questions : la colchicine peut-elle prévenir la survenue d’une péricardite (question principale) et d’une FA (question secondaire) dans les suites précoces d’une chirurgie cardiaque ?
Elle a inclus 360 patients âgés en moyenne de 65 ans. La moitié a eu une chirurgie coronaire, un quart une chirurgie valvulaire, les autres des chirurgies aortiques ou des chirurgies combinées (valves et pontages).
La colchicine a été prescrite à partir du troisième jour postopératoire, à raison de 1 mg deux fois par jour le premier jour, puis de 0,5 mg/j pendant 1 mois. Les résultats de cet essai, concernant la prévention de la péricardite postopératoire ont été publiés en 2010. Ils avaient montré que la colchicine peut réduire de moitié le risque de péricardite précoce et de 42 % le risque de péricardite à 12 mois.
Pour l’évaluation de l’effet sur la prévention de FA, n’ont été pris en compte que les patients en rythme sinusal au troisième jour postopértoire et donc, lors de l’introduction du traitement. L’analyse a porté sur 336 patients, évalués au terme d’un suivi moyen de 30 jours. Les résultats de cette partie de l’essai ont été présentés par Massimo Imazio (Turin) et publiés concomitamment dans Circulation. Ils montrent une baisse de 45,5 % de la survenue d’une FA en postopératoire (22,0 contre 12,0 % ; p = 0,021). Plus encore, cet effet s’est accompagné d’une diminution significative de la durée de l’arythmie lorsqu’elle est survenue (3, jours sous colchicine contre 7,7 jours sous placebo ; p ‹ 0,001), d’une réduction de celle du séjour hospitalier (9,4 jours sous colchicine contre 10,3 jours sous placebo ; p = 0,040), d’une diminution du temps passé en rééducation fonctionnelle (12,1 jours sous colchicine versus 12,9 jours sous placebo ; p = 0,009) et d’une durée d’hospitalisation globale plus courte (21 jours sous colchicine contre 24 jours sous placebo ; p = 0,030).
Il n’a pas été enregistré de différences significatives entre les groupes en termes d’effets indésirables et de survenue d’AVC (incidence moyenne de 1,2 %).
L’étude COPPS démontre donc qu’un traitement simple, la colchicine, selon un schéma posologique lui aussi simple (1 mg le premier jour, 0,5 mg par jour ensuite pendant 1 mois), est efficace à réduire le risque de péricardite et de FA précoces après une chirurgie cardiaque.
Elle encourage à utiliser un tel schéma thérapeutique. Toutefois, son faible effectif justifie une confirmation à plus grande échelle. L’utilisation de la colchicine dès la phase préopératoire pourrait aussi être évaluée afin de juger si elle peut réduire l’incidence de la FA survenant le premier et le deuxième jour siovant l’intervention.
(1) Imazio M. et al. Colchicine reduces postoperative atrial fibrillation. Results of the Colchicine for the Prevention of the Postpericardiotomy Syndrome (COPPS) atrial fibrillation substudy.Circulation 2011;124: 2290-95.
Article précédent
Pas de bénéfice en prévention secondaire
Article suivant
L’athérome coronaire peut régresser
L’apixaban chez les malades à risque
Vers un triplement des doses dans certaines situations
Pas de dronédarone en cas de fibrillation atriale permanente
Une diminution de la mortalité totale à faible posologie
Pas de bénéfice en prévention secondaire
La colchicine prévient les péricardites et la fibrillation atriale précoce
L’athérome coronaire peut régresser
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024