Et si c’était un diabète monogénique ?

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Publié le 28/03/2025
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Un test systématique réalisé à Liège-Université montre qu’un patient sur dix étiqueté « diabète de type 2 » pourrait en réalité être atteint d’une forme monogénique. La prise en charge étant différente, la question d’un dépistage systématique se pose.

Les traitements pourraient être bien différents voire inutiles

Les traitements pourraient être bien différents voire inutiles
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Il existe plusieurs formes de diabètes monogéniques, très hétérogènes sur le plan clinique, ce qui explique la difficulté à les reconnaître. « Les mettre en évidence est pourtant essentiel car leur pronostic, leur prise en charge, peuvent différer, sans compter l’éventualité d’anomalies associées et d’un dépistage familial (conseil génétique) », souligne le Pr Nicolas Paquot (CHU de Liège, Belgique). Le service de diabétologie du CHU de Liège et le centre Egid à Lille se sont lancés en septembre 2019 dans une étude d’analyse génétique des patients apparemment diabétiques de type 2 (DT2) et suivis en consultation au CHU de Liège : 3 121 patients ont été testés. À noter qu’un patient peut associer à la fois une mutation monogénique et une prédisposition au DT2 : plus de 600 loci indépendants sont associés au risque de DT2 commun.

11 % de « DT2 » monogéniques

Les résultats retrouvent une mutation génétique chez 11 % des patients analysés — bien plus que les 1 à 2 % attendus pour cette maladie considérée comme rare. L’autre surprise a été l’âge d’apparition : alors qu’ils sont classiquement considérés comme touchant des patients jeunes (enfance ou adolescence), ces diabètes mutés ont été plus tardifs chez les patients testés. De même, les complications décrites en association avec ces mutations n’étaient pas toujours retrouvées et, bien que ces mutations se fassent sur un mode autosomique dominant, les antécédents familiaux étaient rarement décrits.

Les mutations retrouvées

Les mutations le plus souvent mises en évidence dans cette étude étaient de type Mody (Maturity onset diabetes of the young) :

— 18 % avaient un variant pathogène pour ABCC8 ; associée à un diabète néonatal ou à un diabète Mody 12, cette mutation répond bien aux sulfamides oraux.

— 18 % une mutation du gène WFS1, donnant un diabète mais sans les caractéristiques du syndrome de Wolfram.

— 14 % une mutation du gène HNF1A (Mody 3), qui s’accompagne d’un risque accru de complications microvasculaires et de cancers du pancréas, du foie, des reins. Ces patients sont très sensibles aux sulfamides oraux.

— 6 % une mutation du gène HNF4A (Mody 1), présentant elle aussi une bonne sensibilité aux sulfamides oraux.

— 4 % une mutation du gène GCK-Mody 2 : il s’est avéré qu’aucun traitement n’est nécessaire chez eux, hormis chez la femme enceinte, car ce diabète est associé à une hyperglycémie qui restera toujours très modérée.

« Au vu de ces résultats, il apparaît utile de tester les patients avec un DT2, car un sur dix pourrait être porteur d’un mutation associée à un diabète monogénique. Le coût du test génétique — qui devrait encore baisser s’il se généralise — pourrait être compensé par le fait que certains sous-groupes de diabètes monogéniques n’ont finalement pas besoin d’être traités ou relèvent des sulfamides oraux, très peu coûteux », souligne le Pr Paquot.

Entretien avec le Pr Nicolas Paquot (Belgique)

Dr Nathalie Szapiro

Source : Le Quotidien du Médecin