À la différence d’autres domaines du soin, le défaut d’observance à la contraception n’expose pas à des complications médicales ni à des rechutes mais à un risque de grossesses non désirées. D’où une problématique singulière qui englobe des dimensions à la fois médicales, comportementales et psychologiques. Cet aspect multifactoriel peut expliquer en partie le paradoxe entre une couverture contraceptive importante et un nombre quasi constant de grossesses non désirées.
Selon L’INPES (Institut National de Prévention et d’éducation pour la Santé), malgré un taux de 90 % de femmes sous contraceptif, un tiers des grossesses ne sont pas prévues et 20 % des grossesses non désirées surviennent chez des femmes sous pilule.
Le contraceptif oral reste le moyen plébiscité, surtout pour les plus jeunes mais son talon d’Achille est l’observance qui doit être irréprochable. Or, les femmes ont parfois des problèmes de gestion quotidienne qui nécessitent d’évoquer l’existence d’alternatives.
Inventorier les désirs dans une démarche de contrat implicite
Le colloque singulier doit être interactif. « Je demande à ma patiente ce qu’elle connaît sur la contraception », avance le Pr Marie Flori (directrice du collège universitaire de médecine générale, Lyon). Sur ce terrain commun, il est possible d’inventorier les désirs et la volonté de contraception dans une démarche de contrat implicite. Il faut que ce choix coïncide avec le contexte de la famille et le mode de vie de la patiente (en couple ou non, sexualité, craintes), en gardant en mémoire que les habitudes de vie peuvent évoluer au cours de la vie. « Chez la jeune femme, je précise qu’il existe d’autres moyens que la pilule et j’utilise le support www.choisirsacontraception.fr », complète le Pr Flori. Elle constate une augmentation des demandes de dispositifs intra-utérins qui constituent la deuxième méthode la plus utilisée (26 %). « Il y a 10 ans, j’avais parfois des femmes de 30 ans sans enfant qui m’en demandait. Aujourd’hui les femmes de 20 ans sont demandeuses. Il est néanmoins nécessaire de faire le point avec elles sur leurs connaissances, leurs souhaits… », indique la praticienne.
Instaurer un rituel
Lorsque les femmes choisissent la pilule, la première prescription s’effectue pour trois mois avec un rendez-vous suivant pour apprécier l’adhésion à cette méthode contraceptive. L’observance n’est pas toujours évidente chaque jour à heure fixe et il faut instaurer un rituel. « L’alarme sur le téléphone portable est utile », note le Pr Flori. Pour les adeptes des applis, il existe plusieurs solutions. (myPill®, Ma Pilule). Dans sa thèse intitulée « Contraception orale et observance : que retiennent les patientes des consultations ? », Damien Marquet montre que « le fait de proposer une prise en routine est, d’une part, quasiment toujours fait et, d’autre part, le seul critère significativement associé au fait que les patientes oublient moins de prendre leur pilule (pas ou occasionnellement). »
« Je parle aussi de la stratégie en cas d’oubli de pilule et je remets la fiche de l’Inpes », ajoute le Dr Flori. La patiente doit connaître les moyens de rattrapage et les solutions pratiques pour y pourvoir.
Des choix évolutifs
La contraception orale initiée chez la jeune fille nécessite ensuite d’être rediscutée au fil du temps. Chez les patientes plus âgées, il faut tenir compte de leur expérience et apprécier le poids des écarts d’observance. « Il ne faut pas hésiter à demander si la pilule convient encore », note la généraliste. En cas d’oubli fréquent, il faut penser à changer de méthode en interrogeant les représentations individuelles des différentes modalités. La discussion porte sur les avantages et les inconvénients des différents modes de contraception. Parfois, des patientes sont opposées au fait d’avoir un implant dans le bras alors qu’elles sont intéressées par le dispositif intra-utérin. Là encore, le dialogue et la compréhension sont fondamentaux..
Une étude du NEJM publiée début mars le confirme : « Quand une femme est satisfaite de sa méthode de contrôle des naissances, elle a plus de chances de l’utiliser convenablement, réduisant ainsi ses chances d’avoir une grossesse non désirée ». Encore faut-il que les ressources existent. Une autre étude récente montre que la réduction des moyens alloués au planning familial au Texas s’accompagne d’une diminution de la contraception et d’une augmentation des grossesses non désirées. Ce n’est donc plus une problématique d’observance mais de disponibilité !
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