De notre envoyée spéciale
« Tonton Simon » a le regard et le verbe acérés lorsqu’il parle des élections municipales. Place des Palmiers, au second étage de l’imposant Hôtel de Ville, le maire d’Ajaccio défend autant ses 13 ans de mandature que sa volonté d’accéder au trône de la cité impériale pour la troisième et dernière fois.
Pour l’ancien pédiatre, 67 ans, « tonton » de tous les gamins aujourd’hui en âge de voter, l’enjeu est crucial. Deux adversaires d’envergure le défient : Laurent Marcangeli, député UMP de 33 ans et « étoile montante du parti » selon la maison-mère ; l’union nationaliste de José Filippi qui fédère – chose rare – autonomistes modérés et indépendantistes purs et durs. Et, de fait, pèse lourd dans les intentions de vote.
Pour simplifier l’équation, quatre autres candidats font barrage au Dr Renucci. Le frontiste José Risticoni entend surfer sur les bons résultats de Marine Le Pen à l’élection présidentielle de 2012, deuxième à Ajaccio derrière Nicolas Sarkozy. Les listes de deux anciens conseillers de Simon Renucci pourraient contribuer à l’éparpillement des voix à gauche. Le dernier à tenter l’aventure est un ancien élu local de droite.
Le 4 mars, un sondage donne l’ancien pédiatre gagnant à 40 %, devant la liste de Laurent Marcangeli (31 %). Crédités de 14 %, les nationalistes se maintiendraient au second tour. En cas de triangulaire, le locataire de l’Hôtel de ville l’emporterait à plus de 55 %, quelle que soit la configuration.
Alliance shakespearienne
Dans cette dernière bataille, le Dr Renucci parviendra-t-il encore à convaincre les 35 000 électeurs d’Ajaccio (sur 65 000 habitants) ? L’intéressé, social-démocrate « rocardien », est un vieux loup politique. Il évoque sans fard son « alliance shakespearienne » de 2001 avec la gauche plurielle, le prince Charles-Napoléon et les radicaux qui lui permet de remporter la mairie, tenue par les bonapartistes depuis un demi-siècle.
En 2008, le médecin récidive avec 66 % des voix. Fréquente lors des élections locales, la « prime au sortant » s’appliquera-t-elle en 2014 à Ajaccio ? Rien n’est moins sûr, d’autant que Laurent Marcangeli est loin d’être une bleusaille. La « raclée phénoménale » - son expression - de la droite en 2008 lui a servi de tremplin politique. En moins de quatre ans, il entre au conseil municipal, au conseil général et à l’Assemblée nationale, raflant le siège du député Renucci, son ancien pédiatre de deux fois son âge.
Clientélisme
Pragmatisme et expérience : c’est ce que le Dr Renucci oppose aux ambitions de son jeune adversaire, « qui travaille peu mais toujours avec arrogance ». Le maire est « fier » de son bilan. Sous sa férule, Ajaccio s’est « métamorphosée », assure-t-il. 240 millions d’euros ont été investis (en 13 ans) pour l’action sociale (crèches, écoles, aides aux plus démunis), les travaux de rénovation urbaine, la culture (le « petit Zénith » d’U Palatinu), sans oublier l’hôpital de la Miséricorde (encadré).
Palabres ! rétorquent les opposants au maire. Qui rend coup pour coup. On l’accuse de plomber le budget municipal par les charges de personnels ? Une conséquence de sa politique sociale qu’il assume. Il surtaxe les déchets ménagers ? Que ses adversaires apprennent à compter. Clientélisme ? « Simon est trop paranoïaque pour se permettre d’être clientéliste », plaisante le Dr Jean-Paul Carrolaggi, médecin généraliste nationaliste rallié dès le premier tour à son ami de 30 ans (époque union régionale des médecins libéraux). En cas de victoire, le généraliste sera adjoint du pédiatre. Quelques dents grincent mais le Dr Renucci n’en a cure. Ouvrir sa liste aux Verts et aux nationalistes de gauche d’A Manca est stratégique. Pas arriviste. « Peut-on gagner une élection sans l’union la plus large qui, je le rappelle, représente la diversité ajaccienne ? », interroge l’édile.
Les nationalistes en arbitre ?
L’union nationaliste (qui représente 90 % du mouvement) pourrait détenir les clés de cette bataille électorale. Tenace, José Filippi joue le maintien au second tour et refuse de dévoiler ses cartes. « Nous ne sommes ni de droite, ni de gauche, plaide son colistier Jean-François Casalta. Aucun rapprochement n’est prévu ». L’avocat veut croire que le mouvement nationaliste est « mûr » pour accéder aux responsabilités municipales. La droite est « ouverte au dialogue », la gauche encore plus. Les « natios » à la mairie d’Ajaccio, ce serait une première.
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