Rééducation post-partum

Une amélioration significative du désir avec la CMP

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Publié le 12/04/2018
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Crédit photo : PHANIE

Si la rééducation du périnée par le biais d’une sonde (électrostimulation ou biofeedback) est fréquemment pratiquée sur la femme en post-partum ou en cas d’incontinence urinaire, celle qui s’effectue via la méthode de la « connaissance et maîtrise du périnée » (CMP) est moins connue des professionnels de santé. Cette méthode didactique de rééducation créée dans les années 90 par la sage-femme Dominique Trinh Dinh vise à développer la mise en mouvement des différents muscles périnéaux et, ainsi, d’augmenter la perception sensitive des différentes zones périnéales. Avec la CMP, la sage-femme fait travailler un à un chacun des différents muscles du périnée de sa patiente en lui proposant des visualisations mentales adaptées à la zone à mobiliser. « La patiente travaille ses muscles les uns après les autres, toujours sur une expiration », explique Delphine Durfort, sage-femme libérale à Aire-sur-l’Adour (Landes).

Outre la tonification musculaire du périnée, l’objectif de la CMP est de permettre à la femme d’avoir une pleine conscience de son périnée. « En permettant de mieux connaître les différentes zones du périnée, la CMP aide la femme à érotiser son vagin. Les patientes ayant été traitées par CMP nous faisaient régulièrement des retours très positifs quant à l’amélioration de leurs fonctions sexuelles. Pour vérifier ces affirmations et évaluer l’impact de la CMP par rapport celui de la sonde sur la sexualité des patientes, j’ai souhaité conduire une étude » (1), précise Delphine Durfort.

L’étude a été menée d’octobre 2016 à mars 2017 auprès d’un échantillon de 98 femmes volontaires (région Nouvelle-Aquitaine, Paris, Lyon et Nîmes) ayant effectué une rééducation du périnée par CMP ou par sonde chez un kinésithérapeute ou une sage-femme formés à l’une ou l’autre des méthodes. Chacune des patientes a été questionnée sur sa sexualité, avant et à la fin de sa rééducation via un questionnaire validé, le Female Sexual Function Index (FSFI), qui comprend 19 items et étudie les six domaines de la fonction sexuelle féminine : désir, excitation, douleur, lubrification, satisfaction et orgasme. Le score total du FSFI est compris entre 2 et 36, avec une dysfonction sexuelle définie pour des scores inférieurs à 23, le score moyen de la population générale française étant de 25,2 (2).

Un lien intime entre périnée et sexualité

L’étude a montré que les deux méthodes de rééducation périnéale ont un effet positif sur les différents paramètres de la sexualité féminine. Mais les scores FSFI totaux de la CMP étaient nettement supérieurs à ceux de la sonde : 27,4 contre 25,7.

« L’étude a par ailleurs montré que, d’un point de vue statistique, la progression des scores moyens obtenue sur le domaine “désir” après rééducation est significative, au bénéfice de la CMP (p = 0,0498). Et lorsque l’on fait un focus sur la classe d’âge le plus représentée dans l’étude (les 20-40 ans, 85 % de l’effectif total), le test statistique montre un niveau de significativité plus marqué encore que sur l’effectif total, avec une valeur p de 0,013 », assure Delphine Durfort.

Le lien intime entre périnée et sexualité a déjà été montré par de nombreux auteurs, et les résultats de cette étude viennent les confirmer. La CMP pourrait ainsi être proposée aux patientes ayant une sexualité hypoactive ou qui ont une diminution du désir. Elle pourrait donc être un outil complémentaire aux prises en charge sexologiques actuellement proposées. Elle a également toute sa place dans le cadre du post-partum pour aider les jeunes accouchées (même asymptomatiques) à restaurer leur fonction sexuelle.

(1) Étude analytique multicentrique à visée comparative effectuée en France métropolitaine. Sur 200 questionnaires distribués (100 en CMP et 100 en sonde), 98 sont revenus complets (avant et après rééducation) : le taux de participation a donc été de 49 %. 59 patientes ont été traitées par CMP, et 39 par sonde
(2) Wylomanski S et al. DOI : 10.1016/j.annder.2013.09.255

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Le Quotidien du médecin: 9656