Exercice physique

Les preuves cliniques de la réadaptation

Publié le 04/06/2012
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La preuve clinique que la dysfonction endothéliale fait le lit de la maladie athéroscléreuse existe depuis longtemps (1). Quand l’endothélium artériel est lésé, une sténose artérielle peut survenir au bout de quelques mois ou de quelques années. La couche unicellulaire représentée par l’endothélium occupe dans le corps une surface considérable. Les différences de vitesses du flux sanguin sont à l’origine d’un shear stress, c’est-à-dire de forces de cisaillement s’exerçant sur cet endothélium et qui a comme conséquence une production de monoxyde d’azote (NO). Ceci est connu chez tous les patients et les sujets sains. Ainsi, un athlète qui développe un exercice intense multiplie sa production de NO à peu près par13.

Flux-dépendance.

Chez les patients qui ont des facteurs de risques, on sait que la pratique de l’exercice physique améliore la fonction endothéliale, évaluée par la capacité d’une artère à se vasodilater ; c’est ce qu’on appelle la vasodilatation flux-dépendante. Cela est vrai chez les patients qui ont des facteurs de risques cardio-vasculaires, chez ceux qui présentent un syndrome métabolique et chez les sujets jeunes comme chez les sujets âgés. L’amélioration de la vasodilatation flux-dépendante est la traduction de l’amélioration de la fonction endothéliale.

Chez les coronariens.

En post-infarctus, après pontage ou angioplastie, toutes les études depuis plus de dix ans vont dans le même sens : la pratique d’un exercice en continu et d’intensité modérée améliore la vasodilatation flux-dépendante par rapport à un groupe contrôle. Les études les plus récentes montrent une amélioration de la fonction endothéliale selon un facteur de 2 à 3. Un travail intéressant met en évidence que l’arrêt de l’entraînement physique entraîne la perte du bénéfice acquis dans un laps de temps de quelques semaines (2). Plusieurs équipes, notamment celle de Leipzig, ont mis en évidence, sur des prélèvements d’artères, les mécanismes biologiques aboutissant à une augmentation de la biodisponibilité du NO, responsable de la diminution du stress oxydant, ou au contraire à son inhibition.

Insuffisance cardiaque.

Dans l’insuffisance cardiaque, l’entraînement physique améliore la vasodilatation flux dépendante et diminue les résistances périphériques. La première étude date de 1996 (3). Les auteurs montrent que l’entraînement restaure la vasodilatation endothélium-dépendante liée à la production de NO chez les patients entraînés. Puis, l’équipe de Hambrecht (4) est venue confirmer ces résultats ; elle retrouvait aussi une corrélation entre l’amélioration de la fonction endothéliale et celle des capacités physiques. Les mécanismes de l’amélioration de la fonction endothéliale semblent en rapport avec une augmentation du relargage et de la biodisponibilité du NO en réponse au shear stress provoqué par l’exercice. Ainsi, une augmentation de la NO synthase et de la NAPDH a été décrite (4,5).

Plusieurs équipes ont également montré que l’exercice physique provoque, en parallèle, une augmentation des cellules progénitrices endothéliales (6,7). Ces cellules sont chargées de réparer l’endothélium lésé, et sont à l’origine de la formation de néocapillaires. Elles favorisent ainsi la récupération de la fonction endothéliale et l’angiogenèse.

Reste à savoir quel type d’entraînement est le plus adapté pour l’amélioration de la fonction endothéliale. La plupart des études parues récemment vont dans le sens de l’interval training, qui est un dérivé de la technique fractionnée du sportif. Mais… c’est très à la mode, et il convient de rester prudent ! On peut concevoir simplement que lors d’un exercice, on mobilise la colonne sanguine, on augmente donc le shear stress avec pour conséquence une augmentation de la fonction endothéliale et une production de cellules progénitrices. Pour le moment, il n’y a pas de preuve formelle qu’un exercice soit plus adapté qu’un autre. Le choix pour un patient tiendra compte de son état, de ses préférences. On peut également combiner des exercices d’endurance et de résistance. Les exercices modérés en continu sont le plus souvent suffisants. Il faut en tout cas privilégier la régularité de l’exercice qui est bien plus importante que l’intensité de l’effort.

D’après un entretien avec le Dr Marie Christine Iliou, chef de service de réadaptation cardiaque, hôpital Corentin Celton, Issy-les-Moulineaux.

(1) Schächinger et coll. Prognostic impact of coronary vasodilator dysfunction on adverse long-term outcome of coronary heart disease. Circulation 2000;101(16);1899-906.

(2) Vona M, Rossi A, Capodaglio P, Rizzo S, et coll. Impact of physical training and detraining on endothelium-dependent vasodilation in patients with recent acute myocardial infarction. American Heart J. 2004;147(6):1039-46.

(3) Hornig B, Maier V, Drexler H. Physical training improves endothelial function in patients with chronic heart failure. Circulation 1996;5;93(2):210-4.

(4) Hambrecht R, Fiehn E, Weigl C, et coll. Regular physical exercise corrects endothelial dysfunction and improves exercise capacity in patients with chronic heart failure. Circulation 1998;15;98(24):2709-15.

(5) Hambrecht R, Adams V, Erbs S, et coll. Regular physical activity improves endothelial function in patients with coronary artery disease by increasing phosphorylation of endothelial nitric oxide synthase. Circulation 2003;107(25):3152-8. Epub 2003 Jun 16.

(6) Sandri M et coll. Effects of exercise and ischemia on mobilization and functional activation of blood-derived progenitor cells in patients with ischemic syndromes: results of 3 randomized studies. Circulation 2005;111(25):3391-9. Epub 2005 Jun 13.

(7) Van Craenenbroek E. Exercise acutely reverses dysfunction of circulating angiogenic cells in chronic heart failure. Eur Heart J 2010;31:1924-34. Epub 2010 Mar 18.

 Dr Brigitte Martin.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9135