Dire que le cancer coûte cher, parce que les médicaments anticancéreux sont chers, parce que la population vieillit et qu’il y a aura de plus en plus de malades, sous-entend qu’il y a un choix à faire entre garder une cancérologie de très haut niveau et donc continuer à la financer, ou accepter des contraintes économiques au détriment de la qualité des soins.
Or les médicaments anticancéreux aujourd’hui ne représentent que 0,6 à 0,7 % des dépenses de l’assurance-maladie et l’ensemble de la cancérologie (traitements, soins, hospitalisations, transports, arrêts de travail…) environ 10 %. C’est plutôt modeste. C’est moins que la psychiatrie ou encore que les maladies cardiovasculaires.
Il faut aussi tenir compte du fait que lorsqu’un patient guérit ou lorsque son cancer se chronicise, il reprend éventuellement le travail s’il l’a interrompu. Il reste, ou redevient, un acteur économique à part entière, ce qui n’est pas le cas des patients atteints de pathologies neurologiques ou psychiatriques graves. Enfin, l’innovation en médecine, et en cancérologie en particulier, est génératrice de croissance économique. Elle crée des emplois, facilite l’innovation technologique, contribue au rayonnement de la France dans le monde. « Il ne faut pas voir le médicament anticancéreux comme une source de gaspillage, insiste le Pr Gilles Freyer, il faut lutter contre cette caricature qui l’accrédite du bénéfice de trois mois de survie à un prix exorbitant ».
Chacun a droit à l’excellence
L’excellence en médecine sous-entend plusieurs notions : prodiguer les meilleurs soins aux malades avec les experts les plus performants ; avoir la meilleure recherche clinique et biologique possible ; avoir un système de soins performant et solidaire, c’est-à-dire qui fonctionne bien et qui permette l’accès aux soins au plus grand nombre. La France et l’Allemagne sont les pays d’Europe qui ont les meilleurs taux de survie des malades atteints de cancer. Enfin, les études d’opinion montrent que la grande majorité des patients en cancérologie est satisfaite de leur relation avec les soignants (90 %).
Coordination, compétence et collégialité
« Nous avons eu trois Plans cancer successifs et je pense que ce sont des réussites, insiste le Pr Freyer. En particulier le premier, qui a été à l’origine d’une organisation nouvelle avec notamment la mise en place des 3C (Centres de coordination en cancérologie). La formation et le recrutement de personnels dédiés, la mise en place des RCP, la création de consultations d’annonce, ont permis de travailler efficacement et de façon collégiale. Le sigle 3C pourrait aussi se décliner ainsi : coordination, compétence et collégialité ».
La prise en charge du cancer de l’ovaire répond à ces trois paramètres. En effet, il survient dans la moitié des cas chez les femmes âgées de plus de 75 ans qui présentent d’autres pathologies. Leur état nécessite une prise en charge par un cancérologue, un chirurgien, un médecin traitant, un gériatre et divers autres intervenants (travailleurs sociaux…) au cours du parcours de soins. Tous les acteurs impliqués doivent être compétents, coordonnés et agir en considérant toutes les pathologies associées, c’est la collégialité.
« On reproche à la science sa rigidité, sa complexité, sa froideur, conclut le Pr Freyer. Mais n’oublions pas que la science est une conquête de la raison humaine… ».
Entretien avec le Pr Gilles Freyer, oncologue médical, directeur de l’Institut de cancérologie des Hospices Civils de Lyon
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