L’ézétimibe est disponible en France depuis janvier 2005. Cette molécule est le premier représentant des inhibiteurs de l’absorption digestive du cholestérol et permet de diminuer de 15 à 20 % en valeur relative, les taux de cholestérol plasmatique.
Depuis sa commercialisation, aucun essai clinique n’avait permis de savoir si son effet sur la cholestérolémie et son mode d’action étaient associés à un bénéfice clinique, en termes de réduction des événements cardiovasculaires, et à une absence d’effets indésirables majeurs. Une étude parue en 2008, l’étude SEAS, avait même suggéré que l’ézétimibe pouvait augmenter le risque de cancer. Il avait fallu une méta-analyse de l’ensemble des données alors disponibles pour envisager que l’effet enregistré sur les cancers dans l’étude SEAS était probablement du au hasard.
La grande et seule étude d’évaluation des effets cliniques de l’ézétimibe est l’étude IMPROVE IT. Programmée en 2004-2005, elle devait initialement enrôler 10 000 patients et être menée jusqu’à ce que 2 955 événements du critère primaire soient survenus. Plusieurs difficultés dans sa conduite ont justifié différents amendements et la population à enrôler a été portée en cours d’étude à 18 000 patients et le nombre d’événements du critère primaire à 5 250. En novembre 2014, presque 10 ans après son début, les résultats de cet essai ont été présentés par Christopher Cannon (Boston, États-Unis).
Après syndrome coronaire aigu
L’étude IMPROVE IT avait comme objectif d’évaluer si un traitement par de l’ézétimibe à 10 mg par jour, permet de réduire le risque d’événements cardiovasculaires majeurs chez des patients venant d’avoir un syndrome coronaire aigu de moins de 10 jours.
Pour être inclus les patients devaient avoir un LDL cholestérol bas, c’est-à-dire, inférieur à 1,00 g/l s’ils recevaient déjà une statine ou inférieur à 1,25 g/l s’ils n’en recevaient pas au moment de l’inclusion. Quelle que soit la statine prise antérieurement, elle était arrêtée et tous les patients recevaient de la simvastatine à 40 mg par jour. L’ézétimibe ou son placebo était ajouté en double aveugle au traitement.
Le critère primaire évalué associait les décès CV, IDM non fatals, réhospitalisations pour angor instable, revascularisations coronaires après les 30 premiers jours et les AVC.
Après plusieurs analyses intermédiaires, l’étude a été menée à son terme et 5 314 événements du critère primaire sont survenus lors d’un suivi moyen de 7 ans chez les 18 144 patients inclus.
À l’inclusion, le LDL était en moyenne à 0,95 g/l, il a été abaissé en moyenne à 0,69 g/l dans le groupe contrôle et à 0,54 g/l dans le groupe sous ézétimibe.
L’étude a montré, que, par rapport au placebo, l’ézétimibe permet une réduction significative des événements du critère primaire (HR : 0,936 ; IC 95 % : 0,887-0,988 ; p=0,016) et une réduction significative des infarctus du myocarde (HR : 0,87 ; p = 0,002) et des AVC ischémiques (HR : 0,79 ; p = 0,008).
En revanche, il n’a pas été enregistré de modification des taux de revascularisation coronaire (HR : 0,95 ; p = 0,107), des décès cardiovasculaires (HR : 1,00 ; p = 0,997) et de la mortalité totale (HR : 0,99 ; p = 0,782).
En termes de sécurité d’emploi, il n’a pas été observé d’augmentation des événements indésirables graves : les taux de cancers ont été de 10,2 % dans les deux groupes, les taux d’élévation des CPK, des myopathies, myalgies et rhadbomyolyses ont été de 0,6 % dans les deux groupes et les taux d’élévation des enzymes hépatiques de 2,5 % sous ézétimibe et 2,3 % sous placebo (p = 0,43).
Les commentaires
Cette étude démontre, enfin, que l’ézétimibe permet de diminuer le risque d’événements cardiovasculaires majeurs et qu’elle n’expose pas à des effets indésirables majeurs. En dehors des statines, il s’agit de la première molécule atteignant ce niveau de preuve.
Les commentaires qui en ont été faits à l’AHA résument les principaux éléments de l’analyse faite de cet essai. Ainsi, le méthodologiste Sanjay Kaul (Los Angeles, États-Unis) a fait remarquer que, si une réduction du risque d’événements de 6 % devait être obtenue en enregistrant 5 300 événements, cette réduction pouvait certes, être statistiquement recevable comme significative, mais d’une faible pertinence clinique. Et ce d’autant qu’il n’y a pas de réduction des décès cardiovasculaires et de la mortalité totale.
Pour sa part, Neil Stone (Chicago, États-Unis), président du groupe de travail des recommandations nord-américaines de 2013 pour la prise en charge du risque cardiovasculaire, qui a commenté l’étude en séance plénière juste après la présentation de ses résultats a indiqué : nous disposons maintenant d’une nouvelle molécule bénéfique, qui peut venir compléter le bénéfice clinique obtenu avec les statines. Il a ajouté qu’en matière de prise en charge du cholestérol pour réduire le risque cardiovasculaire, la priorité reste à l’obtention d’une dose maximale tolérée de statine.
Cannon Ch. IMPROVE-IT Trial: A Comparison of Ezetimibe/Simvastatin versus Simvastatin Monotherapy on Cardiovascular Outcomes After Acute Coronary Syndromes. Late breaking clinical trial
Stone NJ. Discussant of IMPROVE-IT Trial: A Comparison of Ezetimibe/Simvastatin versus Simvastatin Monotherapy on Cardiovascular Outcomes after Acute Coronary Syndromes. Late breaking clinical trial
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