La constipation concerne 5 à 35% de la population générale, selon les études. « Pour de multiples raisons, non encore totalement élucidées, jusqu’à l’âge de 75 ans les femmes souffrent majoritairement de constipation chronique, détaille le Dr Jean-Paul Vove, (Bordeaux), avec un sex ratio de trois femmes pour un homme ». Au-delà de 75 ans, le ratio s’inverse, essentiellement du fait des adénomes ou cancers de la prostate et de leurs traitements.
Chez la femme la constipation est volontiers attribuée au contexte psychologique. En fait, il faut distinguer la constipation de transit pour lequel la psyché est rarement en cause de la constipation terminale et troubles de la défécation dans lesquels stress et changements d'habitudes peuvent, en effet, intervenir comme en atteste la proportion importante de femmes qui n'arrivent plus à aller à la selle lorsqu'elles partent loin de l'intimité de leurs toilettes et de leur routine défécatoire. Les réflexes inculqués socio-éducatifs et la personnalité (anxiété de fond) sont impliqués. Néanmoins, les causes de la constipation sont multiples et ne peuvent être réduites au seul versant psychologique. Par ailleurs, « difficile de savoir qui a commencé entre le trouble du transit et l’impact psychologique », fait remarquer le Dr Vove.
Un trouble encore tabou
En fait, si plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la plus forte propension des femmes à la constipation, aucune n’est vérifiée avec certitude. Et, à ce jour, aucun travail n’a démontré de façon formelle le rôle des variations hormonales dans la constipation chez la femme.
Une chose est sûre, en revanche : si elle n'est pas considérée comme une pathologie grave, la constipation est source d'angoisse et de frustration pour les femmes et impacte leur qualité de vie avec son cortège de douleurs abdominales, ballonnements, mauvaise digestion, halitose et troubles du sommeil mais aussi – et on l’oublie souvent – de troubles de la sexualité. Pour les femmes qui en souffrent, leur vie est centrée sur ce trouble encore tabou, qui leur renvoie une mauvaise image de leur corps et d'elles-mêmes. « C’est pourquoi la constipation chronique occupe une place tout à fait certaine dans la genèse des dysfonctions sexuelles des femmes, affirme le spécialiste. Une enquête française a été conduite pour expliciter cet impact négatif sur la vie sexuelle en général des femmes et, en effet, l’étude de deux populations féminines différentes montre les mêmes résultats : la constipation altère significativement la sexualité ».
Elle joue sur le sentiment de bien-être, l’humeur, le désir sexuel mais aussi l’acte sexuel en lui-même, la pénétration même vaginale pouvant être modifiée si la femme a un problème au niveau rectal. Ce constat rejoint celui de l’« Enquête sur la sexualité en France, Pratiques, genre et santé » de l’Inserm (2008) qui confirmait l’effet délétère des maladies chroniques sur la sexualité des Françaises. Dans ce travail, les troubles digestifs en général, la constipation et les maladies inflammatoires intestinales altèrent gravement la fonction sexuelle des femmes, du fait de la maladie elle-même ou des troubles de l’humeur associés.
« Pour ces raisons, rappelle le Dr Vove, devant une insatisfaction sexuelle ou une conjugopathie, le praticien doit s'enquérir d'une éventuelle constipation chronique chez la femme. À l’inverse, il n'est pas inutile de rechercher les troubles de la sexualité chez les femmes souffrant de constipation chronique. »
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