Facteurs environnementaux et comportementaux

Une problématique complexe

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Publié le 26/11/2018
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Le rôle dans l’apparition de cancers de certains éléments de l’environnement et des modes de vie, comme l’amiante ou le tabac, est aujourd’hui reconnu et fortement médiatisé, mais, pour d’autres, dont l’impact est difficile à évaluer, les pesticides notamment, il y a encore controverse. Le Centre international de recherche sur le cancer estime ainsi qu’en France environ 40 % des cancers sont attribuables à des facteurs comportementaux comme la consommation de tabac (20 %) ou d’alcool (8 %) et pourraient donc être évités, 12 % sont liés à l’alimentation et au manque d’activité physique, et 4 ou 5 % attribuables à des expositions professionnelles.

« Plusieurs éléments de l’environnement sont des cancérogènes avérés ou suspectés, mais la démonstration formelle de leur rôle chez l’homme n’a pas été faite, car elle est très complexe : il est souvent difficile d’isoler un facteur environnemental et d’en mesurer l’impact alors que le cancer peut résulter d’expositions simultanées ou successives à plusieurs facteurs aux synergies mal connues. Face à cette problématique de caractérisation des expositions environnementales, nous avons besoin d’études de longue durée sur de grandes populations… et donc d’investissements importants », lance le Dr Béatrice Fervers, coordinatrice du département Cancer et Environnement au centre Léon-Bérard de Lyon.

Une prévention individuelle et collective

Un cancérogène a en général un rôle contributif : il est rarement seul en cause, et le fait d’y être exposé ne conduit pas obligatoirement au cancer. Malgré un fort niveau de preuve de leur cancérogénicité, le risque de cancer induit par les expositions environnementales est souvent plus faible que celui associé aux facteurs liés au mode de vie, le tabac notamment. De plus, on le sait aujourd’hui, c’est l’exposition tout au long de la vie, depuis la conception, qui contribue au risque, et il peut s’écouler plusieurs dizaines d’années entre l’exposition à un facteur et l’apparition d’un cancer. Enfin, les expositions augmentent probablement le risque de rechute ou de deuxième cancer, mais cela reste à démontrer.

Ces incertitudes et controverses peuvent être déstabilisantes pour le grand public, et entraînent parfois des craintes disproportionnées vis-à-vis des facteurs environnementaux, surtout par rapport aux risques liés au mode de vie et aux comportements individuels. « On pense souvent que c’est l’intervention des pouvoirs publics qui doit régler le problème des pesticides et de la pollution atmosphérique. C’est indispensable, mais il faut également un changement des comportements. La société est-elle prête ? “Nous nous affligeons d’effets dont nous continuons d’adorer les causes”, ironise le Dr Fervers, paraphrasant Bossuet. La prévention relève à la fois d’une démarche collective et du comportement individuel ; l’une ne va pas sans l’autre. »

Enfin, il faut avoir une vision transversale de la problématique, car lorsque l’on met en œuvre des mesures destinées à éviter l’exposition à certains agents cancérogènes, cela contribue à éviter aussi l’apparition d’autres pathologies que le cancer.

D’après un entretien avec le Dr Béatrice Fervers, coordinatrice du département Cancer et Environnement au centre Léon-Bérard de Lyon

Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin: 9705