Cancer bronchique non à petites cellules au stade IV

A côté de la chimiothérapie ?

Publié le 10/10/2013
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LE CANCER BRONCHIQUE est la première cause de mortalité par cancer à l’échelle mondiale. Le cancer bronchique non à petites cellules représente près de 85 % de ces cancers. La majorité des patients ayant un CBNPC sont malheureusement diagnostiqués à un stade avancé ou métastatique.

Les métastases cérébrales représentent la première cause de tumeur maligne intracérébrale et sont une cause importante de mortalité et de morbidité, comme l’a rappelé Delphine Antoni (Strasbourg).

Selon les études (1), environ 26 % des patients ayant un CBNPC au stade IV présentent des métastases cérébrales (20 % uniquement au cerveau et 6 % au cerveau plus dans d’autres sites). Elles apparaissent en moyenne 6,5 mois après le traitement initial mais près de 25 % apparaissent pendant le traitement. Plus de 40 % des patients qui décèdent d’un CBNPC ont des métastases cérébrales. Pour un CBNPC au stade III, le risque d’apparition de métastases cérébrales à 1 an est de 18 % (2). L’attitude thérapeutique doit être stratifiée selon la classification GPA (Graded Pronostic Assessment) proposée par Speduto et al. (2008, 2010) qui tient compte de l’âge, de l’indice de Karnofsky, de la présence de métastases extracrâniennes et du nombre de métastases cérébrales. La prise en charge des troubles cognitifs radio-induits est un défi (lire encadré).

Les stratégies ciblées.

L’arrivée de traitements ciblés dans le CBNPC a permis d’élever la durée moyenne de survie chez certains patients. La découverte de différentes mutations cliniquement pertinentes permet en effet de mieux comprendre la pathogenèse de la maladie et de développer de nouveaux médicaments.

Les premières mutations activatrices découvertes ont été celles du récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR), comme l’a rappelé M. Garassino (Milan, Italie). Elles sont retrouvées dans 10 à 15 % des cancers bronchiques chez les patients européens (30 à 60 % des patients asiatiques). On les retrouve plus fréquemment dans les adénocarcinomes (elles sont rares dans les cancers épidermoïdes, 5 %) et chez les non-fumeurs. Les mutations dans les exons 19 et 21 représentent près de 90 % de toutes les mutations de l’EGFR. Actuellement, trois inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR (gefitinib, erlotinib, afatinib) ont été développés.

Une autre mutation fréquente est celle du gène KRAS, retrouvée dans environ 30 % des cas des adénocarcinomes, contre moins de 5 % des cas de carcinome épidermoïde. La mutation KRAS est associée au statut tabagique. Les deux principaux types de mutations concernent le codon 12 et 13. Il a été montré que les patients avec une mutation KRAS positive répondent moins à un traitement par inhibiteur des récepteurs à l’EGFR. Par ailleurs, la présence d’une mutation KRAS est associée à un mauvais pronostic.

Enfin, une mutation du gène HER2 est présente dans 2 % des cas, concernant plus fréquemment les non-fumeurs, les femmes et les personnes d’origine asiatique.

Les mutations HER2 et les mutations EGFR et KRAS sont mutuellement exclusives. Les tumeurs avec HER2 muté répondraient à une inhibition combinée des récepteurs EGFR et HER2 (afatinib).

La translocation du gène ALK prédomine également dans les adénocarcinomes et chez les non-fumeurs et elle est rare en cas de carcinome épidermoïde. Sa mise en évidence permet aujourd’hui l’administration par voie orale du crizotinib, un inhibiteur sélectif de l’activité tyrosine kinase du récepteur ALK.

Une nouvelle anomalie génétique, ROS 1, a été récemment découverte chez des patients plus jeunes, non fumeurs ayant un adénocarcinome : elle concernerait 2 % des CBNPC et serait sensible au crizotinib.

Les agents anti-angiogéniques font également partie des nouvelles options thérapeutiques (bevacizumab). Enfin, des études sont en cours avec le nivolumab, un anticorps monoclonal bloquant le récepteur à la PD-1

(programmed cell death protein 1) chez les patients atteints d’un CBNPC épidermoïde et ayant déjà été traités par une chimiothérapie à base de sels de platine.

En conclusion, à l’heure actuelle, l’histologie reste toujours le principal critère décisionnel pour l’initiation d’un traitement en cas de cancer bronchique métastatique. En cas de mutations de l’EGFR et de translocations ALK, les nouveaux traitements doivent être utilisés. Dans la majorité des autres cas, la chimiothérapie reste la référence.

D’après le symposium : Which treatment other than chemotherapy for stage IV NSCLC ?

(1) SWOG trials, Gaspar 2005.

(2) Gore 2011.

(3) Patchell et al, Vecht et al.

 CHRISTINE FALLET
En complément

Source : Le Quotidien du Médecin: 9270