Le financement optimal des médicaments innovants a fait l’objet d’un rapport rendu public en septembre dernier par l’Institut Montaigne. « Nous sommes partis du constat que l’innovation thérapeutique avait changé de nature. Le XXIe siècle a lancé le virage des médicaments biologiques et des thérapies géniques. Ces traitements, dispensés majoritairement à l’hôpital, visent des maladies de plus en plus précises et des populations de plus en plus réduites », indique Laure Millet, chargée d’études santé à l’Institut Montaigne.
En 2017, la consommation de soins et de biens médicaux en France s’est élevée à plus de 199 milliards d’euros, soit environ 2 977 euros par habitant. « Parmi ces dépenses, 37,8 milliards d’euros ont concerné les médicaments, soit près de 19 %. On observe une relative stabilité des dépenses de médicaments en ville alors que les dépenses de médicaments à l’hôpital ont plus fortement augmenté. Ainsi, les montants associés à la prise en charge des médicaments onéreux à l’hôpital ont progressé de 20 % entre 2011 et 2016 », souligne le rapport.
Faire face aux contraintes budgétaires
De nombreuses thérapies développées au cours des dernières années ont permis de chroniciser des maladies autrefois jugées sans espoir de guérison. L'espérance de vie et la qualité de vie des patients ont ainsi progressé. Aujourd'hui, des innovations majeures arrivent, qui promettent l'éradication de certaines maladies et la personnalisation des traitements. S'il faut se réjouir de ces progrès, il convient de souligner que l’arrivée de ces médicaments onéreux, en particulier les immunothérapies, se fait dans un contexte de forte contrainte budgétaire. « Un certain nombre de facteurs sociodémographiques, comme le vieillissement de la population, contribuent à une augmentation tendancielle des dépenses de santé. À titre d’exemple, les cancers sont aujourd’hui le 3e poste de dépenses de l’Assurance-maladie », souligne le rapport.
Face à la question du financement des médicaments innovants qui n’a cessé de prendre de l’ampleur dans le débat public, le rapport de l’Institut Montaigne préconise d’améliorer la lisibilité et la pertinence des critères d’évaluation des médicaments, avec une meilleure prise en compte de la qualité de vie et de l’impact sur l’organisation des soins. « L’idée est d’orienter la négociation des prix vers des accords conditionnels, en fonction des résultats d’études en vie réelle. Il faut passer d’une logique a priori, où l’évaluation du médicament et la fixation du prix se basent uniquement sur les essais cliniques, à une évaluation en vie réelle une fois le médicament mis sur le marché et testé en condition réelle d’utilisation », indique Laure Millet. C’est le sens de la proposition n° 7, sur l’expérimentation de nouveaux modèles de financements appuyés sur des registres de vie réelle. « Un nombre croissant de médicaments destinés à un nombre réduit de patients arrive sur le marché. Afin de gérer le risque financier et s’adapter aux nouveaux modèles d’innovation, il est urgent de favoriser des modèles de financement innovants, en particulier la définition de prix par indication et le développement du paiement à la performance », souligne le rapport.
Une autre proposition est de rendre possible, sur le modèle du label américain nommé breakthrough therapy, la priorisation des dossiers concernant des médicaments supposés innovants au sein des autorités chargées de l’évaluation et de la négociation du prix. L’Institut Montaigne suggère aussi de s’inspirer du modèle allemand pour mettre en place un mécanisme de mise sur le marché d’un médicament dès l’obtention de son autorisation de mise sur le marché (AMM) avec une prise en charge immédiate par l’Assurance-maladie. « Un tel mécanisme concernera les médicaments revendiquant une amélioration du service médical rendu élevée », souligne le rapport.
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