L’association Aide aux Familles et Entraide Médicale assiste chaque année plus de 300 membres de familles de médecins en difficulté, en particulier après un décès ou une maladie. « Le Quotidien » s’est entretenu avec sa présidente, le Dr Françoise Guize, et son vice-président, le Pr Philippe Passa.
LE QUOTIDIEN : Quel est le but d’une association telle que l’AFEM et qui peut y avoir recours ?
Dr FRANÇOISE GUIZE et Pr PHILIPPE PASSA : L’association loi 1901 a été créée en 1945 pour venir en aide aux veuves de médecins disparus au combat et qui étaient parfaitement démunies à cette époque.
Progressivement, cette action s’est étendue aux familles de médecins avec enfants confrontés à une détresse morale ou financière à la suite d’un accident, d’une maladie ou d’un décès. Ce sont donc eux qui peuvent bénéficier de nos soutiens.
La plupart du temps, ces situations nous sont signalées par nos délégués présents dans toute la France. Parfois certaines familles nous contactent directement par courrier, mail ou téléphone. Au cours des 20 dernières années, l’AFEM a distribué 1 100 bourses d’études dont 310 en 2013 (80 à 100 nouvelles bourses chaque année).
Quels types d’aides l’AFEM propose aux familles ?
L’aide aux familles est une composante très importante pour notre association. Il s’agit de familles en précarité en raison du chômage, d’un endettement, de la recomposition de la famille ou d’un accident de la vie.
Lorsque nous entrons en contact directement ou indirectement avec une famille, nous lui adressons un questionnaire détaillé sur sa situation financière : logement, revenus, les dépenses, les emprunts et parfois, nous sommes amenés à demander un double de la feuille d’imposition. En 2013, 100 familles avec un total de 237 enfants ont bénéficié de nos aides. Outre le soutien moral que nous apportons, l’AFEM propose trois types d’aide :
- Le secours d’urgence : d’un montant de 3 000 euros maximum, il permet de faire face aux besoins immédiats à la suite d’un changement de statut familial (décès, invalidité, divorce…). Il permet d’attendre la mise en place des aides administratives.
- L’aide de rentrée : elle contribue à financer les dépenses de rentrée scolaire. Selon le nombre d’enfants et leur âge, elle peut varier de 1 500 à3 000 euros.
- L’aide d’été : 2 000 à 3 000euros qui peut permettre de financer les stages, les séjours linguistiques ou en centre de loisirs…
Vous aidez aussi des étudiants ?
L’association propose aux enfants de médecins âgés de moins de 25 ans qui poursuivent des études supérieures ou une formation professionnelle des bourses d’études d’un montant annuel de 6 000 euros versés en deux fois (117 étudiants pour 2013).
Ces bourses sont adaptées aux conditions de ressources, au coût des études, au cursus et à la motivation des étudiants qui bénéficient alors d’un accompagnement personnalisé.
En moyenne, 13 % des étudiants choisissent de devenir médecin à leur tour [voir les trois témoignages recueillis par « le Quotidien »].
Outre les bourses pour les plus nécessiteux, les étudiants peuvent recevoir une « aide aux études » d’un montant de 3 500 euros versés en deux fois. Ces aides sont attribuées aux familles dont la situation financière est moins préoccupante. En 2013, 95 étudiants en ont bénéficié.
Enfin, l’AFEM propose des aides complémentaires sur justificatifs pour des frais exceptionnels auxquels l’étudiant se trouve confronté : frais d’inscription coûteux, déplacement, achat d’équipement, séjours à l’étranger…
L’AFEM cherche avant tout à favoriser l’émergence et la réalisation de projets de vie pour des étudiants qui ne pourraient y avoir accès qu’avec beaucoup de difficulté. Nous proposons un soutien financier, bien sûr, mais aussi moral et psychologique individualisé par un accompagnant dédié. Chaque étudiant ou famille ayant un correspondant bien identifié à l’AFEM. La remise des bourses en début d’année est l’occasion de réunir l’ensemble des étudiants qui bénéficient d’une aide avec les donateurs ou leurs représentants et les membres de l’AFEM.
Comment fonctionne votre association ?
Tous les membres de l’AFEM sont bénévoles. À Paris, 8 membres de l’association assurent la permanence trois jours par semaine.
Dans les départements, des délégués sont chargés de prendre contact avec les familles et les étudiants et de les orienter vers l’équipe parisienne qui étudiera leur dossier. Les délégués sont le relais essentiel entre le milieu médical, les conseils départementaux de l’Ordre, les différents mécènes et l’association.
L’AFEM ne perçoit aucune subvention de l’État ou des collectivités locales. Le budget annuel est financé par les dons de médecins (50 % de la collecte) et par des mécènes : anciens boursiers de l’AFEM, conseils départementaux de l’Ordre médecins, Conseil national de l’Ordre des médecins, Académie de Médecine, associations de médecins retraités, et deux mutuelles, Pasteur Mutualité et MACSF.
Les médecins qui font un don peuvent bénéficier de la déduction fiscale à hauteur de 66 % du montant donné. Tous les renseignements sont disponibles sur le site de l’association.
« Le soutien financier de l’AFEM m’a été bien utile pendant mes années de médecine. Cette bourse a participé indiscutablement à mon entrée en deuxième année et plus tard à mon troisième cycle à Paris. L’AFEM m’a procuré plus qu’une aide financière, une bienveillance désintéressée. C’est bien cela qui m’a le plus marqué et le plus touché puisque cela ne m’était quasiment jamais arrivé dans la vie en dehors du cercle familial. »
Antoine L.
Médecin
« Ma famille a eu la chance de bénéficier de l’aide de l’AFEM lorsqu’elle s’est trouvée en difficulté. Ce soutien financier a été capital et m’a permis de me consacrer entièrement à mes études de médecine dès 2001. Mais l’AFEM c’est aussi et avant tout un soutien humain chaleureux. J’ai toujours reçu un encouragement lors des moments de doute et une reconnaissance du travail qu’imposaient ces études. »
Claire B.
Médecin
« L’AFEM nous accompagnées, ma sœur et moi, dès la disparition de notre père. Les mots du serment d’Hippocrate " Je considérerai ses enfants comme mes frères " ont pris beaucoup de sens pour nous. »
Annabelle C.
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