La santé des médecins

Inquiets pour l'avenir, 48 % des médecins américains veulent changer d’exercice

Publié le 16/02/2017
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RapportPhysiciansFoundation

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Tous les deux ans, plus de 17 000 médecins affiliés à la Physician’s Foundation répondent à un sondage en ligne sur leur exercice, leur état moral et leur avenir. L’étude menée en 2016 a conclu à une dégradation nette des conditions de travail des médecins.

Si l’on en croit les résultats, l’accès aux soins va devenir de plus en plus difficile aux États-Unis. En effet, la grande majorité des médecins ne se sent pas capable de continuer à exercer dans de bonnes conditions si leur patientèle doit encore augmenter. En outre, 14,4 % des personnes interrogées imaginent prendre leur retraite – anticipée ou non – dans les 2 à 3 ans.

L’émergence de cabinets médicaux à plus de 100 médecins

Le mode d’exercice des médecins américains a particulièrement évolué en moins de 4 ans : si en 2012, la moitié des médecins travaillaient en libéral de façon individuelle ou en petites structures, cette part est passée à 33 % en 2015.

Désormais, les cabinets ou des centres des soins qui emploient plus de 100 médecins sont devenus le principal point d’accès aux soins : 20 % des médecins y travaillent et leur nombre augmente chaque année de 4 %. Il faut dire que ces structures facilitent la mise en commun des informations, la gestion des rendez-vous. Elles centralisent aussi les tâches administratives que plus de 65 % des médecins estiment particulièrement pesantes. Globalement, les cabinets médicaux « géants » permettent de répondre plus facilement aux objectifs de santé fixés par les assurances et ils contribuent à garder la patientèle plus captive. Certains regroupements emploient des médecins comme salariés et d’autres comme associés. Le personnel administratif et paramédical est à la disposition des praticiens et rémunéré par eux. Kaiser Permanente Medical Group est actuellement le plus important de ces regroupements avec 7 304 médecins, suivi de la Cleveland Clinic (2 000 médecins).

Les centres de santé de nouvelle génération sont souvent équipés de service d’urgences ou de soins sans rendez-vous et ils ont des accords avec des cliniques ou des hôpitaux si une hospitalisation est nécessaire.

Déjà en Asie du Sud Est, des centres de santé de ce type (Samitivej, Bangkok hospital) se sont développés avec un accès limité aux soins de santé sophistiqués. Ces centres servent de tête de pont pour attirer des patients vers les grands hôpitaux qui font partie de leur réseau.

La mainmise des assurances, la fin de l’exercice individuel

L’un des principaux éléments de l’étude 2016 sur le moral des médecins américains vient de l’impact de la mise en place de mesures par l’une des principales assurances santé publique, Medicare. Pour limiter l’inflation des dépenses de santé, Medicare impose depuis 2015 aux médecins de répondre aux termes du Medicare Access and CHIP Reautorization Act (MACRA) qui permet un paiement à la performance des médecins par le biais de deux mesures : une cotation des actes, et un suivi d’indicateurs de performance. Si les termes du contrat sont remplis, des bonus sont versés. Dans le cas contraire, le médecin est directement pénalisé.

Pour les médecins américains, le MACRA signe la fin de l’exercice en solo ou en cabinet en nombre limité de médecins (moins de 25) car dans ces conditions, de 50 à 87 % des médecins seront incapables de répondre aux termes du contrat en 2019, selon le CMS (Centre for Medicare & Medicaid Services).

Cette mesure qui pourrait permettre de faire des économies substantielles est désormais envisagée par les plus grands assureurs tels que Aetna, Anthem, UnitedHealth Group, Blue Cross et Blue Shield.

Mais le sondage 2016 montre combien les médecins ne sont pas préparés à ce type d’approche puisque seuls 12 % estiment avoir bien assimilé les modalités de paiement sur objectifs du MACRA. Plus de la moitié des personnes interrogées avait peur de l’impact a posteriori des mesures et ne s’était pas préparées à rembourser des sommes qui pourraient être exigées.

Le rapport 2016 fait la part belle au verbatim des médecins qui sont nombreux à parler de mise en faillite et d’arrêt définitif de l’exercice médical si des remboursements étaient exigés.

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Dr I. C.

Source : Le Quotidien du médecin: 9556
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