Plusieurs travaux radiographiques et IRM ont montré que la séquence « existence d’un coin vertébral inflammatoire » puis « existence d’un coin vertébral graisseux » en IRM augmentait de façon très significative le risque de voir apparaître un syndesmophyte sur ce coin-là deux ans plus tard. Certaines de ces études avaient cependant des limites méthodologiques qui ne permettaient pas toujours de conclure formellement, en particulier le fait qu’il n’y avait parfois que deux points d’évaluation IRM (initial et final sans point intermédiaire) et que l’analyse n’était pas toujours faite à l’échelle du coin vertébral lui-même mais à celle du rachis du patient (ce qui n’a évidemment pas la même signification physiopathologique).
3 363 "coins" analysés
Les auteurs de l’étude présentée à Rome se sont servis de la base de données d’imagerie de l’étude ASSERT. Pour mémoire, ASSERT était l’essai thérapeutique pivot contre placebo de l’infliximab dans la spondylarthrite ankylosante. Après les 24 semaines d’infliximab ou placebo, les patients étaient tous traités par infliximab jusqu’à S 102. Les patients avaient eu un bilan radiographique à l’inclusion et à S102, ainsi qu’une IRM à l’inclusion, à S 102, mais également à un point intermédiaire, à S 24. Toutes les images, radiographies et IRM, ont été lues de façon centralisée par deux lecteurs différents qui ne connaissaient pas les données des patients, ni l’ordre des images présentées.
Les auteurs ont analysé sur chaque coin vertébral la présence en IRM d’un œdème inflammatoire ou d’une infiltration graisseuse et l’existence en radiographie d’un syndesmophyte. Ils ont ensuite cherché un lien particulier entre certaines séquences d’anomalie IRM et l’apparition d’un syndesmophyte. Le sous-groupe de patients de l’étude ASSERT qui était analysé comprenait 182 patients et après exclusion des coins non évaluables et de ceux qui avaient déjà un syndesmophyte à l’inclusion, il restait 3 363 « coins » analysés.
Les auteurs ont montré tout d’abord qu’il existait une association significative entre la présence d’un « coin inflammatoire » à un temps donné et l’apparition ultérieure d’un syndesmophyte ; il en était de même pour la présence d’un « coin graisseux » à un temps donné et l’apparition ultérieure d’un syndesmophyte. Ils ont ensuite montré que la présence d’un « coin inflammatoire » et d’un « coin graisseux » (en même temps ou successivement) renforce encore l’association statistique avec l’apparition ultérieure d’un syndesmophyte et que ceci est particulièrement net lorsqu’on assiste à la séquence « coin inflammatoire » puis « coin graisseux ». À l’inverse, l’absence complète de « coin inflammatoire » et de « coin graisseux » à chaque temps diminue le risque d’apparition d’un syndesmophyte. Malgré cette association statistique nette entre l’inflammation et le dépôt graisseux d’une part et l’apparition d’un syndesmophyte d’autre part, il faut garder à l’esprit que 42 à 66 % (suivant le lecteur considéré) des syndesmophytes apparus dans les deux ans n’ont jamais été précédés par un signal inflammatoire ni graisseux en IRM.
Cette étude montre de façon tout à fait élégante que, sous traitement anti-TNF, l’inflammation vertébrale et le dépôt graisseux vertébral en IRM favorisent le développement d’un syndesmophyte radiographique, et tout particulièrement quand un dépôt graisseux fait suite à l’inflammation. Cependant, 50 % environ des syndesmophytes apparaissent sans avoir été précédés par un signal inflammatoire ou graisseux : mais ceci ne permet pas d’affirmer que l’apparition d’un syndesmophyte sans inflammation au préalable et sans signal graisseux préalable est possible ; l’hypothèse alternative est bien entendu que l’on ait « manqué » le signal inflammatoire ou graisseux entre 0 et six mois, voire après les six mois.
Machado P et al. OP 0041
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